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Alalah
 

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   Alalah (ou Alalakh ou Alakhtum ou Mukish ou Tell Açana) était une ancienne ville Amorite près de la ville moderne de Tell Atchana Antakya, dans le Sandjak d’Alexandrette (L’antique Antioche, Turquie aujourd’hui). Elle fut la capitale du petit royaume de Mukish. Elle était située dans la plaine de la rivière Amuq, au Nord du coude formé par l’Oronte. Elle n’est aujourd’hui plus qu’un vaste monticule.
 

 

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L’histoire…….

 
   L’histoire politique de la ville est difficile de reconstituer. Pour certains elle existait déjà vers 3400/3300 et fut un centre régional jusque vers 1700. Pour d’autres elle fut fondée à l’âge du Bronze moyen au cours du IIe millénaire avant notre ère. Elle est considérée comme l’une des premières grandes villes du Croissant Fertile. Pourtant, le premier palais de la citadelle d’Alalah fut construit vers 2400/2300 av.J.C, ce qui laisse suggérer qu’il y régnait un Roi ?. On pense qu’autour de 2300, la ville fut peut-être prise et détruite par Sargon (2334-2279) d’Akkad. Naram-Sin (2255-2218), le dernier souverain important d’Akkad, rapporta dans une inscription qu’il atteignit la mer dans cette région, mais est-ce qu’il attaqua et prit Alalah, cela reste une inconnue.
 
   On sait que vers 2000 Alalah fut contemporaine de la brillante IIIe dynastie d’Ur avec qui elle commerçait. En fait, les premières traces écrites citant le site, mais sous le nom d’Alakhtum, commencent avec les tablettes de Mari, datant du XVIIIe siècle, lorsque la ville faisait partie du royaume du Yamkhad (ou d’Alep) qui dominait de vastes zones dans l’actuelle Syrie. Ces textes de Mari constituent une source importante, en particulier pour le royaume du Yamkhad. Un des documents raconte que le Roi du Yamkhad, Sumu-Epukh (ou Sumu-Epeh, ? -1781), vendit la cité et territoire d’Alakhtum au Roi de Mari, Zimri-Lim (1775-1761/60) pour qu’il les mette en valeur, tout en gardant la suzeraineté sur la ville. Ce dernier était peut-être son beau-fils, époux de Shiptu, mais celle-ci est aussi donnée comme la fille de Yarim-Lim I (ou Iarim-Lim, 1780-1765) le Roi suivant du Yamkhad, les sources sont incertaines. Quelques spécialistes pensent que Yarim-Lim I fut peut-être le constructeur du palais de la couche VII.


 

Une des tablettes retrouvée à Alalah

 
   Après la chute de Mari, qui fut rasée et pillée en 1759, par le Roi de Babylone, Hammourabi (1792-1750), son ancien allié, Alakhtum/Alalah tomba une fois de plus sous l’autorité d’Alep. Ce fut à cette période que son nom évolua pour devenir “Alalakh” et que le Roi d’Alep, Abbân (ou Abba, v.1755-v.1720), arriva au pouvoir. Ce Roi Abbân apparaît dans les archives de Mari parmi les personnes participant au voyage du Roi Zimri-Lim à Ougarit. On sait qu’il monta sur le trône d’Alep et du Yamkhad, par un texte retrouvé à Alalah, dans lequel il dit avoir donné en apanage le royaume d’Alalah à son frère Yarim-Lim II (ou Iarim-Lim, v.1720-v.1700).
 
   Ce don fut fait suite à la rébellion de Zitraddu, le Gouverneur de la ville d’Irridu, qui appartenait à Yarim-Lim II. Une tablette découverte à Alalah explique les circonstances qui conduisirent à la réorganisation du royaume d’Alalah. Elle révèle qu’Abbân détruisit Irridu et pour compenser son frère lui donna la ville en apanage, mais qu’elle serait confisquée si Yarim-Lim II ou ses descendants trahissaient le Yamkhad. Selon Nadav Na’aman, en contrepartie, Abbân prêta serment de ne pas confisquer le nouveau royaume de son frère et qu’il pourrait être maudit si jamais il le faisait. Cette possession du Yamkhad aurait perduré jusque vers la fin du XVIIe siècle.
 
    Les informations sur la ville à cette époque proviennent d’Alep et de Mari. Les sources nous indiquent le nom d’un "Roi fondateur" d’une dynastie dans la cité, un certain Ammitakum (ou Ammitaqu, XVIIe siècle) qui eut un règne exceptionnellement long. Pour certains spécialistes il fut issu d’une branche royale du Yamkhad et il aurait affirmé son autonomie de ce dernier, mais sans se déclarer royaume indépendant. Cet acte a probablement joué un rôle dans la décision d’Alep de ne pas envoyer de renforts pour protéger Alalah de l’attaque du Roi Hittite, Labarna II (v.1650-v.1620, qui prit le nom d’Hattousili I ou Hattusili). Celui-ci, lors d’une campagne, franchit les monts Taurus, attaqua la ville, qu’il prit et dévasta vers 1650 (on trouve aussi v.1625 ?). Puis, partant d’Alalah il conquit le Nord de la Syrie, région importante pour ses routes commerciales et l’accès aux ports méditerranéens de Byblos et Ougarit.
 
   Après une interruption de près d’un siècle des écrits sur Alakhtum, on retrouve de nouveau des traces de la région sous le nom d’Alalah (ou Alalakh), qui devint le siège d’une dynastie locale. La plupart des informations sur la fondation de cette dynastie proviennent d’une statue inscrite avec ce qui semble être une autobiographie du Roi Idrimi. Selon cette inscription, juste avant lui régna, un certain Ilim-Ilimma I (Roi d’Alalah et Roi du Yamkhad, v.1550 à v.1525 ou v.1530-v.1490). Nous ne pouvons nous fier que sur cette statue, seule preuve, car les sources écrites sont presque complètement absentes. Toutefois, de sources Égyptiennes, nous apprenons que le Roi Thoutmosis I (1504-1492) conquit la région. Cependant, les Égyptiens ne semble pas avoir pris la ville, il y eut peut-être un hommage négocié ?. Puis, Ilim-Ilimma I fut chassé du trône par celui qui devint le nouveau maître de la région, le Roi du Mitanni, Parattarna (ou Barattarna ou P/Barat(t)ama, v.1480-v.1450), évoqué dans des textes comme suzerain des villes d’Alalah et de Nuzi. Il semble qu’Ilim-Ilimma I s’enfuit avec sa famille à Emar. Selon Sidney Smith, il eut plusieurs enfants, Idrimi qui lui succéda étant le plus jeune.


 

Statue d’Idrimi (104 cm)
retrouvée dans le temple
– British Museum

 
   Idrimi (v.1490 à v.1450 ou v.1475 à v.1450 ou v.1460 à v.1400) dut prendre la fuite et après de longues années d’errance il réussit à remonter sur le trône d’Alalah. Il fonda le royaume de Mushki qu’il contrôla depuis Alalah. Nous connaissons assez bien son parcours car il y a aujourd’hui sur ce souverain plus de 300 textes sur notamment deux tablettes et une statue que l’on a retrouvés. Cette statue, reposant sur une base de basalte, le représente assis sur un trône et possède une inscription qui raconte sa vie. Sa famille avaient été contrainte de fuir vers Emar. Avec sa mère et une partie de la population, il quitta la cité et rejoignit le peuple d’Apirou (ou Hapiru ou Habiru ou Abirou ou Hapirou ou Habirou ou Ha biru ou Apiru, groupe de personnes qui vivaient comme des nomades dans les régions du Croissant fertile de la Mésopotamie du Nord et l’Iran aux frontières de l’Égypte en pays de Canaan) à Ammija (ou Ammiya), en pays de Canaan.

 
   Les Apirou le reconnurent comme "fils du pays" et s’allièrent à lui. Après avoir vécu parmi les guerriers Apirou pendant sept ans, il les conduisit dans une attaque réussie d’Alalah par la mer et il en devint Roi. À cette époque, il rentra dans les bonnes grâces de l’Empereur du Mitanni, Parattarna (ou Barattarna ou P/Barat(t)ama, v.1480-v.1450), qui avait assujettit la région, qui accepta de le prendre parmi ses vassaux. Ce fait est largement documenté dans ses annales. Idrimi passa alliance avec le Roi du Kizzuwatna, Pilliya (v.1480-v.1450) et envahit des territoires au Nord appartenant aux Hittites. Tous ces faits ne sont vérifiés par aucune autre source et il est à noté que cette statue fut découverte dans un niveau d’occupation datant de plusieurs siècles après la date à laquelle Idrimi est censé avoir vécu, il y a donc un débat entre les spécialistes sur la véracité de ces histoires.

 

Pour plus de détails sur le Roi voir : La vie d’Idrimi

 
   Néanmoins, des dates sur des tablettes archéologiques nous disent que Niqmepa (ou Niqmepuh, en Akkadien : Nikmi-epu, v.1430 à ?), 2e fils d’Idrimi, qui succéda à son frère, Adad-Nirâri (Adad-Nerari ou Ir-Addu ou Ituri Addu, en Akkadien : Adad-Nirari, v.1450 à v.1430), fut contemporain de l’Empereur du Mitanni Shaushtatar I (ou Shaushatar ou Sausatatar ou Shanshatat, v.1440-v.1410), ce qui semble soutenir qu’Idrimi aurait été contemporain de Parattarna (ou Barattarna), le proche prédécesseur de Shaushtatar I. Du règne d’Adad-Nirâri (Adad-Nerari) on ne sait rien si ce n’est qu’il fut succédé par son frère Niqmepa où pour lui de nombreux textes ont survécu. Vers cette époque, les Égyptiens dirigés par Thoutmosis III (1479-1425), menèrent plusieurs campagnes dans le Nord de la Syrie, afin de restreindre l’influence Mitanni. Mais il n’y eut apparemment pas de conquêtes permanentes d’Alalah qui resta sous le contrôle Mitannien. Le fils (?) de Niqmepa lui succéda, un dénommé Ilim Ilimma II (vers 1420), qui n’est connu que par un certificat d’adoption. Pendant la période de son règne, la région Syrienne semble avoir été assez calme, l’Empire Hittite ayant de graves problèmes internes et le Mitanni occupé par les attaques des Égyptiens.


 

Tablette d’argile en cunéiforme d’Alalah,
citant le Roi Niqmepa et l’Empereur    
du Mitanni Shaushtatar I –
British Museum

 
   Le dernier Roi vassal du Mitanni fut probablement Itur-Addu (ou en Akkadien : Adad-Nirâri II, vers 1350 ou ? à 1344). Il dut au cours de son règne lutter avec son suzerain l’Empereur du Mitanni, Tushratta (ou Toushratta ou Touchratta, v.1380-v.1350) contre l’Empereur des Hittites, Souppilouliouma I (ou Suppiluliuma, 1355-1322). Ce dernier, très puissant, décida d’attaquer le Nord de la Syrie où il écrasa Tushratta. Il prit ensuite Ougarit, où le Roi Niqmaddou II (ou Niqmadu, 1353-1318) se soumit. Lorsque les Rois, Itur-Addu et Addu-Nirâri du Nuhashshe (ou Nukhashshe ou Nuhasse ou Nuhašša, petit royaume au Sud d’ Alep) se soulevèrent contre le Hittite et cherchèrent à rallier les royaumes voisins à leur cause, Niqmaddou II choisit de rester dans le camps des Hittites. Plusieurs lettres nous montrent des propositions faites par l’Empereur à Niqmaddou II pour le convaincre de rester fidèle.
 
   Lorsque la coalition fut matée par Souppilouliouma I, qui prit Alalah qu’il intégra à l’Empire Hittites, Niqmaddou II rejoignit son suzerain dans la ville où il conclut un accord diplomatique. L’Empereur régla également les litiges frontaliers entre le Mukish et ses vassaux Ougarit, Alep et Nuhashshe (ou Nukhashshe). Par la suite, le royaume d’Alalah resta un fidèle vassal des Hittites. Sous leur domination, une citadelle fut construite.
 
   Dans l’ensemble, la vie semble avoir continuée sans interruption majeure et la ville connut une grande prospérité, qui est confirmée principalement en raison de nombreuses poteries Mycéniennes de luxe importées à cette époque que l’on a retrouvées. Peu après 1200 et la chute des Hittites, Alalah s’effondra rapidement et la ville fut complètement détruite, comme beaucoup d’autres villes côtières de l’Anatolie et du Levant, sous les coups des Peuples de la mer. Il y eut des tentatives pour la reconstruire, mais le site ne fut jamais réoccupé, le port d’Al Mina prenant sa place dans la région à l’Âge du Fer.

 

Le site archéologique

 
   Les vestiges de la ville conservés au Tell Atchana ont été exhumés par l’archéologue Britannique Sir Léonard Woolley. Ces recherches, au cours des quelles des palais, des temples, des maisons et des murs de fortification furent mis au jour, se déroulèrent en deux phases coupées par la Seconde Guerre mondiale, entre 1937 et 1939, puis entre 1946 et 1946. Dix-sept niveaux archéologiques allant du Chalcolithique (Niveau XVII, 3400-3100 av. J.-C.) au Bronze Final (Niveau 0, XIIe siècle av.J.C) ont été dégagés. Le contexte socio-économique de l’histoire Alalah sous le règne d’Ilim-Ilimma I, d’Idrimi, d’Adad-Nirâri et de Niqmepa y est bien documenté grâce à des tablettes trouvées lors des fouilles sur le site. Toutefois Idrimi, lui-même, n’apparaît que rarement sur les tablettes.
 


 

Vue du site

   Après plusieurs années de recherche, l’équipe de l’Université de Chicago, a tenu sa première saison complète de fouilles, réalisée par Aslihan Yener, en 2003. En 2004, l’équipe a eu une nouvelle courte saison d’étude et d’excavation. En 2006, le projet a changé de parrainage et la reprise des fouilles fut dirigée par Aslihan Yener dans le cadre du Ministère Turc de la Culture et du tourisme et l’Université de Mustafa Kemal à Antakya. Les fouilles à Alalah ont produit un corpus de documents écrits qui exige que des comparaisons avec Mari et Ougarit soient faites. Environ 500 tablettes cunéiformes ont été récupérées au niveau VII, (Bronze-moyen) et au niveau IV (Âge du Bronze). La statue inscrite d’Idrimi, qui a donné une unique autobiographie de la jeunesse du Roi, de son ascension et sa prise de pouvoir, de ses conquêtes militaires, se trouve maintenant au British Museum.
 
   Les textes en Akkadien d’Alalah inclus quelques listes de mots, présages astrologiques et conjurations, mais consistent essentiellement en des tablettes juridiques, qui enregistrent sur la famille régnante des contrôles fonciers et les revenus qui s’en suivent, des documents administratifs, qui enregistrent les flux de produits de base entrés et sortie du palais.
 
   Les recherches archéologiques d’Alalah se sont surtout concentrées sur la zone de la citadelle où se trouve le palais. L’architecture monumentale apparaît dès le niveau XII (2400), pour lequel il a été dégagé une construction voûtée, que les spécialistes identifient à un temple. Deux grandes périodes se détachent : Le niveau VII (Bronze Moyen) qui correspond à la période Amorrite et le niveau IV (Début du Bronze Récent) qui couvre bien l’histoire de la ville. Ces deux niveaux ont pour monument principal le palais, qui change de plan et est agrandit entre les deux périodes. D’importants lots de tablettes ont été retrouvés pour ces deux niveaux, nous renseignant sur la vie politique et économique du royaume d’Alalah. À proximité du palais se trouve un temple, lui aussi remanié au niveau IV. Il était sans doute dédié à la Déesse principale de la cité, Ishtar d’Alalah.

 

Bibliographie

 
   Pour d’autres détails sur la ville voir les ouvrages de :
 
Trevor Bryce :
The Routledge handbook of the peoples and places of ancient western Asia, Routledge, London, New York, 2009.
Ancient Syria : A three thousand year history, Oxford University Press, New York, 2014.
Dominique Collon :
The seal impressions from Tell Atchana/Alalakh, Butzon & Bercker, Kevelaer, 1975.
The Alalakh cylinder seals, Oxford, 1982.
Anne Elizabeth Draffkorn :
Hurians and Hurian at Alalah : An ethnolinguistic analysis, Ann Arbor, Michigan University, 1970.
Amir Sumaka’i Fink :
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George jr Giacumakis :
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Albrecht Goetze :
Alalaḫ and Hittite chronology, Cambridge, 1957.
Marlies Heinz : 
Tell Atchana, Alalakh, Die schichten VII-XVII, Neukirchen-Vluyn, 1992.
Christine E. Morris et Joost H Crouwel :
Mycenaean pictorial pottery from Tell Atchana (Alalakh), pp : 85–98, The Annual of the British School at Athens 80, Athènes, 1985.
Nadav Na’aman :
The Ishtar temple at Alalakh, pp : 209–214, Journal of Near Eastern Studies 39, N° 3, 1980.
Christian Niedorf :
Die mittelbabylonischen rechtsurkunden aus Alalah (Schicht IV), Ugarit-Verlag, Münster, 2008.
Juan Oliva :
New Collations and remarks on Alalakh VII tablets, pp : 1–22, Journal of Near Eastern Studies 64, N°.1, 2005.
Sidney Smith :
Alalakh and chronology, Luzac and Co., London, 1940.
Eva Von Dassow, David I.Owen et Gernot Wilhelm :
State and society in the late Bronze Age : Alalah under the Mittani Empire, CDL Press, Bethesda, Md., 2008.
Donald John Wiseman :
The Alalakh tablets, British Institute of Archaeology at Ankara, Londres, 1953.
Some aspects Babylonian influence at Alalah, Geuthner, Paris, 1962.
Charles Léonard Woolley :
Alalakh, an account of the excavations at Tell Atchana, Oxford, 1955.
Un royaume oublié, Editions Albin Michel, Paris, 1964.
The ancient near eastern world, Oxford, 2005.
Kutlu Aslihan Yener et Stephen Batiuk :
Tell Atchana, ancient Alalakh/ 1, The 2003 – 2004 excavation seasons, Ege Yayınları, Istanbul, 2010.
Frank Zeeb :
Die palastwirtschaft in altsyrien nach den spatbabylonischen getreidelieferlisten aus Alalah (Schicht VII), Alter Orient und Altes Testament 282, Ugart-Verlag, Munster, 2002.

 

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