L’hoplite
et la constitution militaire dans la Grèce classique
par  © Alvise Czarnocki Lucheschi   
 

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Sommaire
 

Introduction historique
Bronze et fer
Le citoyen-soldat
     Le casque : krános
     La cuirasse : thốrax
     Les cnémides : knêmĩdes
     Le bouclier : aspis
     La lance : dóry
     L’épée : xíphos
Les autres branches militaires
     L’infanterie légère
     La cavalerie
Le siège
Les campagnes militaires
En bataille
Le combat singulier
Et Sparte ?
Le déclin
Bibliographie
Filmographie

 

 

 

Des soldats armés jusqu’aux dents, des crinières gigantesques et des boucliers ornés d’images mythologiques ; l’hoplite a fasciné depuis des siècles les historiens. Il a en effet ouvert les portes vers une organisation militaire unique qui eut un grand impact sur l’art de la guerre. Pourtant, les histoires des contes homériques ainsi que les exploits héroïques aux Thermopyles, ont masqué ce qui se cachait vraiment sous cette "carapace" de bronze.
 

Introduction historique

 
   L’hoplite fut un soldat lourdement armé par opposition au gymnète qui fut un fantassin léger. L’hoplite constitua donc l’infanterie lourde des cités Grecques antiques. Il apparut autour du VIIe siècle av.J.C. durant l’époque dite “archaïque“. Cette datation traditionnelle se fonde sur un passage de "la Politique" d’Aristote (Philosophe Grec, 384-322) évoquant le remplacement des combattants à cheval par la phalange hoplitique. Ce qui est certain c’est que des évolutions ont eu lieu à cette époque dans l’armement. La cuirasse fut modifiée, le bouclier se vit adjoindre une seconde courroie, permettant une meilleure prise en main.


 

Hoplite Athénien
image avant retouches : cgsociety.org

 
   Le nom "hoplite" (ou hoplítês, en Grec : πλίτης  hoplitēs) dérive d’hoplon (En Grec : πλον  òplon), qui signifie "arme" ou "soldat lourdement armé". Pour comprendre l’apparition de ce soldat, il faut partir des racines de l’histoire Grecque.
 
   Avant les hoplites, les techniques de guerre étaient moins organisées et moins "professionnelles", voire individuelles. En effet, comme nous le raconte Homère, les batailles se faisaient en combat individuel. Le soldat homérique comptait sur l’art militaire et l’armement de l’époque Mycénienne. Il possédait un casque en bronze, un bouclier en bois recouvert de cuir, ainsi qu’une épée et une lance. L’armure complète, recouvrant presque tout le corps en plaques de bronze, qui était accompagnée par un casque fait de défense de sanglier, fut seulement utilisée par les nobles et les riches. Ces aristocrates combattaient sur des chars de guerre ou des chevaux alors que les citoyens/paysans "pauvres" étaient à pied.
 
   Les soldats combattaient sous les ordres d’un Roi qui les unissait et chaque ville Mycénienne avait son souverain. Or, avec le déclin du monde Mycénien (Autour de 1200 av.J.C), qui selon certains documents Égyptiens fut dû à des suites annuelles de mauvaises récoltes, il y eut un déclin de l’art et de la culture dans le monde Grec. Beaucoup de villes et de palais furent abandonnés. Les famines se répandirent à travers toute la péninsule Grecque et le commerce fut stoppé. La population diminua drastiquement et l’écriture fut presque complètement perdue. Cette période "noire", où la loi du plus fort régnait, fut plus tard appelée par les historiens les "Âges sombres ou le Moyen-âge Hellénique ou encore Période intermédiaire".
 
   De plus, comme dit plus haut, il faut noter que la situation fut aggravée par le fait que toute la civilisation Mycénienne n’était pas unie sous un seul Roi, du moins pas que l’on sache, vu que nous n’avons aucune preuve concrète qui nous soit parvenue. On peut donc supposer qu’il y eut quelques villes plus puissantes, ayant pris un certain pouvoir "organisateur" sur le pays, comme Mycènes, la plus prestigieuse de toutes les cités à cette époque. Ce qui lia surtout les Mycéniens fut leur mode de vie, leur culture et le commerce entre leurs différentes implantations. Les cités qui survécurent à cette "catastrophe", commencèrent à former leurs propres lois, mais aussi leurs propres soldats. En effet, n’étant plus soumises à une politique organisée, les villes Grecques s’entre-attaquèrent pour survivre.
 
   Elles durent également faire face aux assauts des "Peuples de la Mer" (Des brigands, en partie composés de Mycéniens, pratiquant la piraterie). Ces faits les obligeant à apprendre à se défendre avec leurs propres moyens. L’équipement militaire ne vit à cette période toutefois aucun changement spécial et resta le même pendant des siècles. Peu après 800 av.J.C. la situation chaotique se stabilisa, portant à une croissance lente mais régulière des différentes cités. On vit alors pour la première fois l’apparition du mot pólis (En Grec : πόλις, ou poleis au pluriel), terme définissant une cité-État. Même si ces cités-États parlaient la même langue, avaient la même religion, la même culture, mais aussi le même style pour combattre à la guerre, les rivalités formées durant les "âges sombres"  restaient quand même très présentes.
 
   Il reste tout de même une grande erreur à ne pas faire, celle de penser que l’apparition de l’hoplite advint du jour au lendemain. Il faut prendre en compte que les cités-États, comme Sparte et Athènes, étaient, à leur origine, constituées de paysans, voire de peuples migrants. Il y eut de nombreux facteurs clés importants qui ralentirent la "naissance" de l’hoplite comme nous le connaissons aujourd’hui. En effet, il fallut prendre en considération différents aspects :
Celui matérielle, comme les armements en bronze ou en fer (voir Chapitre Fer et Bronze) qui demandaient un savoir-faire élevé;
Celui politique, pour organiser les actions militaires ;
Il faut aussi compter l’expérience militaire qui ne se créa qu’au cours de décennies de guerres et de rivalités entre les États ;
Et le plus important, les habitants eux-mêmes.
   Athènes, qui fut la plus grande des cités-États à l’époque n’avait que quelques milliers d’habitants, sans compté les esclaves et les femmes. Donc les textes historiques d’Hérodote (Historien Grec, 484-v.425) ou de Thucydide (Historien Grec, 484-v.425) parlant de plusieurs milliers d’hoplites, appartiennent à un lointain futur.


 

Reconstitution d’une phalange Spartiate

 
   J’ai pris en considération les différents facteurs "possibles" ayant porté à la création de l’hoplite, mais il faut souligner le terme possible, puisque même aujourd’hui les historiens ne savent pas exactement comment l’évolution du fantassin Grec eut lieu. Sûrement cela fut connecté à des influences étrangères. Par contre, le point dont nous sommes certains, c’est que l’armement obligea une adaptation à la formation en rang serrés, connue aussi sous le nom de phalange (En Grec : φάλαγξ  phálanx) hoplitique.
 
   Les premiers à avoir positionné pour la première fois les soldats en rangs compacts, furent les Spartiates. Selon Tyrtée (Poète Spartiate du VIIe siècle av.J.C.) tout soldat était obligé de combattre épaule contre épaule avec son compagnon et d’éviter quelconque geste héroïque qui pouvait compromettre la cohésion de la formation. On peut conclure alors sans problème que la montée en puissance de l’hoplite est dépendante de celle des cités-États.

 

Bronze et fer

 
   Comment parler d’un soldat sans parler du fer et du bronze. Comme mentionner auparavant, le fer et le bronze eurent un rôle clé dans l’évolution militaire de l’hoplite, mais aussi dans le développement des cités-États. L’utilisation du fer apparut en Méditerranée autour du VIIe siècle av.J.C. On parle alors de l’âge du fer, suivant l’âge du bronze. Nous le savons, le bronze est un alliage, composé de deux tiers de cuivre (Surtout du cuivre contenant de l’arsenic, élément qui lui donne une plus haute résistance que le cuivre pur) et un tiers d’étain (Les chiffres peuvent variés, vu que la composition de l’alliage changeait en fonction des régions). Il fallait donc trouver d’abord ces deux minéraux, calculer les bonnes proportions, les faire fondre, les mélanger et puis passer par des forges où une certaine expérience était requise.
 
   Avec la découverte d’un très grand nombre de gisements de minerais de fer dans la péninsule Grecque, le prix d’achat d’une arme en fer baissa énormément (2kg de fer pouvaient coûter 1g d’argent), permettant ainsi à plus d’hommes de pouvoir de se permettre l’équipement d’hoplite. De plus, le procédé de fabrication du minerai de fer devenait plus simple. Il fallait le chauffer à des températures autour de 800°C avec du charbon, le verser dans des formes prédéfinîtes d’armes et puis le refroidir rapidement dans l’eau froide, pour qu’il puisse absorber les particules de charbon et devenir ainsi plus résistant.
 


 

Scène de combat

   Par contre, penser que l’âge du fer marqua la disparition du bronze est faux, puisque bien que le fer soit moins cher que le bronze, il est dans certains cas moins résistant que celui-ci. Le bronze resta donc le choix numéro un pour les cuirasses, les boucliers et tout autre objet ayant des formes plus compliquées à forger. Le fer de son côté, se retrouvait dans les épées, les lances ou les flèches. C’est pour cela que durant toute son histoire, l’hoplite fut caractérisé par le bronze et non pas par le fer.
 

Le citoyen-soldat

 
   Une croyance générale des gens aujourd’hui, est de penser que la "démocratie" fut omniprésente en Grèce. Ce qui est vrai, c’est que la fondatrice de ce système est et reste Athènes. Pour être plus exact, la "démocratie" fut introduite vers 508 av.J.C par les réformes de l’aristocrate Clisthène (ou Klisthène ou Clisthenes ou Kleisthenēs, 570- après 507) qui fut Archonte annuel en 525. Quelques cités adoptèrent cette forme de gouvernement, tandis que la plupart continuèrent à être dirigées par des tyrannies, des oligarchies ou des royautés, comme Sparte, Thèbes ou Corinthe.
 
   C’est pour cela qu’il convient de diviser le rôle du citoyen-soldat en deux parties : Les soldats d’Athènes (sous la démocratie) qui serviront d’exemple pour presque toutes les autres cités-États, vu que celles-ci s’inspirèrent énormément du système militaire démocratique et enfin Sparte à laquelle nous dédirons un chapitre à part. Dans le cas d’Athènes (Mais aussi pour toutes les autres poleis) il faut souligner la liaison entre le soldat et le citoyen. Même si ce fut une ville démocratique, tout citoyen libre, était obligé de prendre les armes et servir ainsi sa ville en cas de guerre. On parle ici "du citoyen qui offre corps et âme pour la protection de sa ville". L’entraînement d’un Spartiate atteignait les 10 ans en général (Si le soldat survivait à celui-ci), mais il faut se rappeler que dans la majorité des cités-États, l’hoplite était un simple agriculteur ou artisan qui, dans les temps de paix, pratiquait son métier journalier. Ainsi l’entraînement hoplitique dans a plupart des cités d’un citoyen fut imposé à 2 ans, comparable au service d’arme obligatoire de nos temps.
 
   L’entraînement commençait dès que l’éphèbe (En Grec : φηϐος  éphêbos signifiant jeune, voire adolescent) atteignait les 18 ans. Nous savons qu’à Athènes, les nouveaux soldats-citoyens devaient faire un serment au temple d’Aglauros. Serment qui est parvenu jusqu’à nos jours :

 "Je ne déshonorerai pas les armes sacrées ; Je n’abandonnerai pas mon compagnon là où je me trouverai posté ; Je combattrai pour les principes sacrés, ceux des Dieux comme ceux des hommes ; Je ne laisserai pas la patrie amoindrie mais au contraire plus grande et plus forte, de mon propre chef et avec le concours de tous ; J’obéirai aussi à ceux qui se succèdent sagement aux affaires, ainsi qu’aux lois établies et à toutes celles qui pourront être établies avec sagesse. Si quiconque cherche à les renverser, je ne le laisserai pas faire, de mon propre chef ou avec le concours de tous ; J’honorerai les cultes de mes ancêtres. En sont témoins les divinités Aglauros, Hestia, Enyo, Enyalios, Arès et Athéna Areia, Zeus, Thallo, Auxo, Hégémone, Héraklès, ainsi que les frontières de ma patrie, les blés, les orges, les vignes, les olives et les figues." (D’après Lycurgue contre Léocrate, 77,2.).
 


 

Danse Pyrrhique

   À Athènes, la première année était dédiée à un entraînement physique, qui devait préparer le jeune soldat au combat. Ce qui fut dans les temps archaïques une pratique basique sans un sens profond, devint sous l’Athènes démocratique, quelque chose d’organisé qui fut pris au sérieux. Ainsi les jeunes s’entraînaient dans des gymnases. S’y ajoutaient la danse "Pyrrhique" où les éphèbes dansaient en armure (Ceci devait apparemment leur apprendre à esquiver des coups et à en donner). La course à la torche ainsi que la lutte, appartenaient aussi au programme journalier. Lors de la course hoplitique, les jeunes hoplites devaient parcourir 400 m. le plus rapidement possible, en portant seulement leur casque et leur bouclier.
 
   Durant leur deuxième année de service, les éphèbes partaient dans des camps aux frontières des poleis ou dans des citadelles ayant un emplacement stratégique important. Pendant cette année, le vrai service militaire (Qui était plus intensif) commençait. Les jeunes apprenaient à manier les armes et à combattre dans des formations serrées, comme la phalange. Ces longues périodes d’absence, à la campagne furent vues comme un rituel qui marquait le passage de l’enfance à l’âge adulte. Dans le même temps, pour les "riches", la période de formation était un peu différente. Les jeunes des familles aisées, recevaient dans la plupart des cas des entraînements physiques ainsi que théoriques privés. Il fallait suivre l’idéal de l’homme parfait, ayant un corps, mais aussi un esprit sain. Entre autre, ces jeunes apprenaient a monter à cheval et recevaient des formations dans l’art de la rhétorique, de la politique et de la guerre. En effet, ces jeunes entreprenaient très souvent une carrière politique et finissaient donc dans les rangs des différents magistrats ayant un pouvoir exécutif au sens politique, mais aussi militaire.
 
   Pour le simple citoyen ayant terminé l’entraînement, "l’adulte" devenait officiellement citoyen d’Athènes et pouvait retourner à sa vie normale. Nombreux furent ceux qui reprirent le travail familial comme artisan ou comme agriculteur. Cependant, les frontières ne pouvaient tout de même pas être laissées sans garde. Certains soldats devinrent donc à la suite de l’entraînement, des soldats de "profession". Souvent poussés pas le manque de travail en ville ou par "l’exclusion" sociale. Ils passaient une grande partie de leur vie dans les avant-postes frontaliers et devinrent ainsi la colonne dorsale vétéran d’une phalange dans les cas de guerre. Les hoplites de profession pouvaient aussi profiter d’un abri et d’un approvisionnement gratuit en nourriture de la part de la ville. Ces soldats, étaient aussi ceux les plus tentés à participer aux expéditions mercenaires, étant donné qu’ils possédaient une expérience majeure au combat.


 

Hoplite Spartiate
au Ve siècle av.J.C

 
   À partir de la réforme de Clisthène, Athènes fut subdivisée en 10 tribus (Les Érechthides, les Égéides, les Pandionides, les Léonidès, les Acamantides, les Œnéides, les Cécropides, les Hippothoontides, les Aiantides, les Antiochides), chacune divisée à son tour en trois Trittyes (quartiers ou villages. Athènes en compta 30 repartis sur les zones urbaines, rurales et marines de l’Attique). Le chef d’une tribu était appelé Philobasileus (ou philo basileus). Les tribus furent ainsi le cœur de la vie politique de la cité. Tous les membres magistrats, ainsi que les électeurs, venaient de ces tribus.
 
   La désignation des magistrats militaires, fut un des rares cas ou le tirage au sort ne fut pas à la règle. Il y avait en tout 10 Stratèges (En Grec : Στρατηγός Stratêgós de “Strateia” qui signifie “Terre publique“), apparemment un pour chaque tribu, élus pour un an par l’Assemblée. Ils avaient pratiquement le contrôle total sur les forces militaires Athéniennes (mer et terre) et pouvaient appeler les citoyens aux armes en cas de guerre. La fonction du Stratège restait une des plus prestigieuses, mais elle ne fut pas caractérisée par une égalité de prestige entre les membres, comme nous le montre Périclès (ou Periklês ou Periklễs, v.495-429), le plus connu de tous les Stratèges. En effet, c’était surtout le talent et le charisme du Stratège qui lui donnait un avantage face à ses concurrents.
 
   À côté du Philobasileus et du Stratège, les tribus avaient également un Phylarque (En Grec : φύλαρχος, en Latin : Phylarchus, “chef de tribu“) et un Taxiarque (En Grec : ταξίαρχης ou ταξίαρχος, “chef de régiment“). Le premier ayant en charge la cavalerie, le deuxième les hoplites. Le commandement fut différent à Sparte. Normalement, c’était le Taxiarque qui s’occupait surtout de donner les ordres dans son groupe d’hoplites. Les vétérans expérimentés avaient aussi un certain statu hiérarchique face aux autres hoplites.
 
   Faire la guerre, signifiait survivre dans ce continuel affrontement entre poleis. Les citoyens "tombés pour leur patrie" furent particulièrement honorés. Le souvenir des morts (Surtout ceux des Guerres Médiques) restait vivace. Des discours et hommages funèbres étaient tenus par les hauts-magistrats pour louer le courage des hoplites tombés lors des batailles. L’oraison funèbre de Périclès, rapportée par Thucydide (Homme politique et historien Athénien, v.460-v.400/395) est une des plus connues de nos jours. Elle servait aussi à fortifier le lien entre le "citoyen-soldat" et sa poleis. Or durant toute l’histoire Grecque, même si Athènes fit énormément de guerres, ses pertes en soldats ne furent jamais si considérables qu’elles pouvaient causer des répercussions sur le développement démographique.
 
   Les Grecs n’appliquèrent que rarement la tactique de l’extermination et du massacre pour bloquer l’ennemi. Même durant le siège d’Athènes par les Spartiates, les Athéniens perdirent plus de citoyens à cause de la peste que par les épées Spartiates. La grande question reste alors si on doit parler du "citoyen-soldat" ou du "soldat-citoyen" ?. Il est difficile de répondre à une telle question qui est principalement liée au caractère de l’hoplite et de son engagement personnel envers sa ville.
 
   Il faut admettre qu’à la base et contrairement aux Spartiates, les citoyens Athéniens mais aussi les habitants de tout le reste de la Grèce, avaient des attaches civiles (Comme un travail, une famille ou des propriétés agraires) plutôt que militaires. Les problèmes familiers et économiques, accompagnaient les hoplites dans leur campagne militaire, ce qui n’était pas le cas des Spartiates, vu que leur unique "souci" était le champ de bataille et la guerre. L’armure hoplitique ne fut donc qu’une carapace qui cachait en-dessous le visage d’une autre personne avec d’autres inquiétudes.

 


 

Casque Corinthien

L’armement

 
          Le casque
 
   Le casque (En Grec : κράνος  krános) fut et reste le symbole principale qui nous aide à reconnaître l’hoplite. Forgé d’une, voire plusieurs plaques de bronze, il permettait une protection essentielle pour la tête du soldat et pouvait atteindre un poids d’environ 4 kg. La forme du krános changea de période en période.
Le Kegel en fut une des premières. Sa forme primitive ne donnait qu’une protection pour les joues, tandis que le visage et surtout la nuque restaient à la merci des coups ennemis.
Le Kegel fut suivit par le casque Corinthien primitif. Il avait une protection pour la nuque ainsi que des protège-joues pointues recouvrant grande partie de la mâchoire. Cependant il ne possédait pas d’ouvertures pour les oreilles.
Le casque Illyrique ressemblait au casque Corinthien tardif, vu qu’il avait une protection pour le nez et les protège-joues, se serraient en direction bouche.
   Finalement avec le casque Corinthien tardif, toutes les caractéristiques qui nous sont connues aujourd’hui étaient déjà présentes. Le casque permit une protection totale de la mâchoire et du visage, ainsi que de la nuque. Le handicap de l’ouïe fut résolu avec des ouvertures pour les oreilles, par contre la vision ainsi que la commodité (Surtout sous la chaleur) restaient réduites.


Représentation d’un casque
Corinthien dans sa
dernière phase

 
   Il faut toutefois souligner que le problème de la vision, ne doit pas toujours être perçut d’un point de vue négatif, puisqu’il faut se rappeler que les casques étaient conçus pour le combat en groupe et non pas singulier. Donc, dans un tel cas, la protection prit plus d’importance que la commodité. Presque tous les casque Corinthiens avaient un cimier (Fait des crins de chevaux) qui servait pour impressionné l’ennemi, mais aussi pour caractérisé le propriétaire en le colorant en noir, rouge, blanc etc. Il était toujours placé verticalement, sauf chez les Spartiates, chez lesquels les officiers étaient les seuls à porter le cimier transversalement. Le cimier permettait également aux soldats des rangs antérieurs de s’orienter en observant les mouvements des cimiers des hoplites des rangs postérieurs.

 
          La cuirasse
 
   La cuirasse (En Grec : θώραξ  thốrax) était composée de deux plaques en bronze, reliées entre elles par des charnières ou des fils de cuir. Elle était adaptée à la taille de son propriétaire. On y ajouta souvent des formes de muscles pour impressionner et intimider l’adversaire. À cause de son poids, l’hoplite avait toujours besoin de l’aide de son serviteur ou d’un compagnon pour pouvoir l’endosser. Porter une telle armure demandait de l’entraînement et une grande endurance, c’est pour cela que vers la fin du VIe siècle, elle fut remplacée par le plus efficace linothorax (En Grec : λινοθώραξ), une cuirasse qui se répandit jusqu’en Étrurie et à Rome vers la fin du VIIe siècle.
 
   Non seulement il coûtait moins cher, mais il pesait aussi la moitié du poids d’une cuirasse en bronze et résistait très bien aux coups d’épées et de lances. Le linothorax était composé à l’extérieure de plusieurs couches de lin et à l’intérieur il contenait des plaques en bronze et quelques couches de cuir. Au contraire de la cuirasse en bronze, le linothorax avait quatre parties principales. Deux plaques protégeant le devant et l’arrière, deux protèges-épaules ainsi que des lanières en cuir tombantes devaient protéger l’hoplite des coups visés au haut de sa jambe. Le tout était fixé par des lacets en cuir. À cause du lin, la couleur du linothorax était le blanc, bien que beaucoup d’hoplites aimaient l’orné d’images colorées (Par exemple la tête d’un lion) ou des figures géométriques. L’hoplite devint ainsi plus agile au combat et ne souffrit plus autant sous le poids et la chaleur de sa cuirasse, comme avec celle en bronze.

 
Cnémides en bronze trouvées
dans le tombeau de Philippe II

 
          Les cnémides
 
   Les cnémides (En Grec : κνημδες  knêmĩdes, de knêmê jambe) étaient fabriquées en bronze, mais parfois aussi en fer ou cuir. Modelées selon la forme du tibia du porteur, elles offraient une protection du bas de la jambe jusqu’au début des genoux, voire jusqu’aux genoux eux-mêmes (dépendant du modèle). Elles furent parfois ornées et fournissaient la protection principale au-dessous du bouclier. Les archéologues ont longtemps pensé qu’elles étaient fixées par des lacets à la jambe du propriétaire, mais ils découvrirent récemment que le métal était forgé à l’arrière plus finement, le rendant ainsi maniable et permettant à l’hoplite de se le fixer à la jambe sans qu’il tombe durant le combat.
 
          Le bouclier
 
   Le bouclier, l’aspis (En Grec : σπίς  aspís) ne doit pas être confondu avec l’òplon. En effet, dans le monde moderne, la littérature a commencé à faire des liens entre le terme hoplite et òplon (Dans ce cas la fausse traduction du mot "bouclier"). l’Òplon par contre n’a rien à voir avec le bouclier, mais au contraire signifie simplement "arme" (voir Chapitre : Introduction historique). Dans les textes anciens, les auteurs n’utilisèrent jamais le mot òplon pour désigner le bouclier typiquement rond de l’hoplite, mais le mot aspís.
 
   L’aspís était un bouclier rond ayant un diamètre entre 80 et 100 cm. et pouvait atteindre un poids de 9 kg. Sa particularité fut qu’il possédait une forme de bol, permettant ainsi une meilleure tenue et résistance face aux coups de lance ou d’épée. Normalement, il était fabriqué en bois et recouvert de bronze. Pour pouvoir mieux contrôler et s’appuyer sur son bouclier, les Grecs mirent un brassard (En Grec : Πόρπαξ  Porpax) à une extrémité et une poignée (En Grec : Αντιλαβή  Antilabè) à l’autre. Cette technique appelée "prise Antilabe", permettait à l’hoplite d’utiliser une grande partie de la force de son bras et y exercer une pression notamment plus haute, ce qui ne fut pas le cas chez les premiers boucliers où la poignée se trouvait au centre de celui-ci, réduisant ainsi la pression sur un seul petit point.
 
   L’aspís se tenait sur le bras gauche, la lance ou dóry au contraire dans la main droite. Le bouclier, fut aussi le point de reconnaissance sur lequel les hoplites mirent le plus d’importance. En effet la première chose qu’un hoplite adversaire voyait durant une bataille, c’était l’image sur le grand bouclier de l’adversaire. Dans l’Iliade, Aiace fut surtout caractérisé par sa taille, mais aussi par son gigantesque bouclier. Le bouclier d’Achille, décoré par Héphaïstos, devint la pièce la plus prestigieuse de toute son armure après sa mort. L’emblème caractérisait donc l’hoplite, comme un peu le décor des casques des Samouraïs. Il y eut trois différentes catégories d’emblèmes pour les boucliers : Premièrement, des signes apotropaïques, des représentations de lions, de bœufs etc…, ou de créatures mythologiques, servant à chasser la malchance mais aussi à terrifier l’ennemi.
 


 

Bouclier d’hoplite Athénien

   Deuxièmement, il y eut des emblèmes qui représentaient les familles nobles ou les différents "clans" (Ceci valut pour les temps anciens et finit durant l’âge d’or des poleis). Troisièmement, il existait aussi des emblèmes pour les différentes villes, comme par exemple le grand "Λ"/ L sur les boucliers des Lacédémoniens (autre nom pour Spartiates).
 
   Une autre variante de bouclier, fut l’aspís koilè. Celui-ci possédait des coupures à demi-lune sur les côtés. Ce bouclier date environ du VIe siècle av.J.C. Bien qu’aucun exemplaire n’ait survécu jusqu’à nos jours, beaucoup d’amphores démontrent son existence. L’aspís koilè fut probablement réalisé pour permettre un passage plus facile de la lance durant une phalange, sans naturellement compromettre la formation de celle-ci.
 
   Les peltastes (en Grec : πελτασταί peltastaí de πέλτη  péltê "bouclier léger") Thraces (infanterie légère) de leur côté, utilisèrent un bouclier ayant la forme d’un  "croissant", le peltè. Il était fabriqué en bois et recouvert d’une peau de chèvre ou de mouton. Sur sa face externe, comme chez l’aspís, des figures géométriques mais aussi animalières (serpents, lion etc.) pouvaient être présentes.

 
          La lance
 
   La lance (En Grec : δόρυ  dóry) fut l’arme d’attaque la plus importante de l’hoplite. On peut la définir aussi comme la partie offensive de la phalange. Le dóry était fabriqué en bois de cornouiller ou de frêne et pouvait atteindre un poids de 2 kg. Il était équipé aussi de deux pointes : Celle pénétrante (environ 20 cm), faite en fer ou bronze, qui servait à transpercer et tuer l’ennemi et celle sur le talon, plus courte en forme de clou conique pointu, qui servait à achever les ennemis à terre, voire à fixer sa lance au sol avant le début d’une bataille. Au contraire de celle Macédonienne, la lance hoplitique n’atteignait seulement les 2 mètres.
 
   Durant une bataille, l’hoplite avançait devant le bouclier un peu plus de la moitié de sa lance. Ceux de la deuxième rangée tenaient pratiquement 1/4 de la lance dans leurs mains, le reste était posé sur l’épaule du compagnon et dépassait aussi le bouclier de celui-ci. Les soldats de toutes les autres rangées, tenaient leurs lances en air et posaient toute leur force sur le bouclier. Le dóry n’était pas une arme de jet, mais de combat.

Hoplite de Sparte

 
          L’épée

 
   L’épée hoplitique (En Grec : ξίφος xíphos) était un moyen de secours dans le cas où la lance se brisait (Ce qui n’était pas rare en bataille). Le xíphos ne mesurait qu’entre 40 et 70 cm. C’était donc un grand poignard plutôt qu’une vraie épée d’impact. En effet, le xíphos devait rester d’un côté une arme facilement maniable avec une seule main et de l’autre permettre de “percer” l’ennemi dans les petites ouvertures non protégées. La taille, le bas du ventre mais aussi la gorge étaient les cibles préférées durant une bataille. Un autre type d’épée est connu, le kopís (En Grec : κοπίς kopís). La lame de celui-ci était recourbée à l’intérieur où se trouvait aussi son côté tranchant. Au contraire du xíphos, le but primordial du kopís était d’infliger des coupures graves à l’adversaire pour le faire mourir d’une perte de sang. Bien qu’utilisé aussi par l’hoplite, il fut l’arme de combat rapproché préférée par les peltastes et la cavalerie.
 
   En général, l’équipement de l’hoplite était très onéreux (Nous ne savons pas le prix exact, mais selon les sources anciennes on peut supposer plusieurs centaines de drachmes d’argent) et pouvait atteindre un poids de 35 kg. Durant les âges d’or des poleis Grecques, ce fut souvent l’État qui mit en disposition l’armement au soldat. L’armure eut une grande importance symbolique pour le citoyen Grec. Elle montrait non seulement son lien avec sa “patrie” mais fut aussi un objet héréditaire de grande valeur, transmis de père en fils.

 

Les autres branches militaires

 
          L’infanterie légère
 
   L’infanterie légère fut surtout constituée de peltastes Thraces. Ceux-ci étaient caractérisés par leur bouclier à la forme de demi-lune ou croissant, le peltè, mais aussi par leur style "nordique" comme le bonnet Phrygien, le manteau en peau d’ours et les grosses bottes en cuir. Normalement, ils avaient comme arme principale quelques javelots, ainsi qu’une épée courte, voire un poignard. Les peltastes n’avaient pas d’armure, seulement une tunique à manches courtes pour faciliter le jet du javelot.

  
   D’un autre côté, les peltastes recrutés au sein des villes Grecques (Appelées aussi en Grec : ψιλοί  psiloi, signifiant littéralement "nu" ou "dépouillé") avaient tendance à porter simplement un bol métallique comme casque (le Pilos, nom dérivé d’un chapeau typiquement porté à l’époque) et une tunique légère.

 
   Les peltastes furent souvent utilisés comme appuie à la phalange. En effet, ils flanquaient fréquemment les phalanges, voire se trouvaient immédiatement devant celles-ci, pour pouvoir "accueillir" l’ennemi avec un jet de javelots, avant de se mettre en sécurité derrière l’infanterie lourde. Grâce à leur rapidité, ils pouvaient être utilisés pour des attaques furtives, des combats de guérilla, des poursuites, mais aussi comme explorateurs. Vers le IVe siècle av.J.C, les peltastes devinrent plus sophistiqués et armés, devenant ainsi encore plus efficaces dans les batailles. Ils furent un élément clé dans les "raids" durant la Guerre du Péloponnèse (431-404), ainsi que durant la bataille de Sphactérie, où pour la première fois dans l’histoire, un simple groupe de peltastes et de frondeurs Athéniens, infligea une défaite remarquable aux hoplites Spartiates.

 
   Les archers, de leur côté, ne furent utilisés que rarement en bataille, puisque le combat à grande distance était vu à l’époque comme lâche et indigne. Les Spartiates, qui avaient un sens de l’honneur très fort en ce qui concerne les affrontements corps à corps, n’utilisèrent que rarement ou pas du tout les archers.
 
   Les arcs étaient petits et destinés à des tirs à courtes distances. Pour leur donner plus de puissance, ils étaient recourbés au milieu. Les pointes des flèches étaient principalement faites en bronze, vu la résistance et la capacité de pénétration du matériau.
 
   Même si les Grecs n’aimaient pas combattre en tant qu’archers, cela ne signifiait pas que d’autres ne puissent le faire à leur place, sous forme de mercenaires. En effet, les archers Scythes étaient très appréciés par les Athéniens, à tel point que durant les Guerres Médiques (499-479) ils en achetèrent des milliers, pour les utilisés dans les rangs de l’armée, mais aussi comme police de la ville. Xénophon (Philosophe, historien et maître de guerre Grec, v.430-v.355) loua aussi des archers Crétois, qui grâce à leur agilité et habilité, furent une aide importante pour contre-attaquer les tribus montagnardes durant l’Anabase.
 
   Les frondeurs se trouvaient dans la même situation que les archers. Souvent recrutés au sein des régions coloniales (Comme l’Asie Mineure ou le Moyen-Orient), ils avaient comme but de "bombarder" l’ennemi avec des projectiles en pierre, bronze ou plomb.

 
   Même si le rayon de précision n’atteignait que les 40 à 50 mètres, la performance d’un tel projectile était impressionnante. Il pouvait sans problème transpercer un casque et briser le crâne, ainsi que causer des fractures mortelles. La fronde était composée d’une pochette en cuir, pour placer le projectile, attachée à des lanières en lin ou laine. Dans certain cas, les peltastes furent également utilisés comme frondeurs.
 
   Les joueurs de flûte ou aulètes méritent aussi d’être mentionnés. Leur rôle principal était de donner du courage aux soldats et de créer un rythme de marche. La flûte double ou aulós était (comme le dit le nom) caractérisée par ses deux chalumeaux. La musique en bataille avait une telle importance, qu’elle fut même présente dans l’éducation militaire et sportive des jeunes éphèbes.

 
          La cavalerie
 
   Les Grecs ne peuvent pas être vus comme des maîtres cavaliers. La cavalerie fut toujours mise en connexion avec la noblesse et richesse. En effet, il n’y avait que les riches qui pouvaient se permettre d’avoir un cheval. À partir du VIIe siècle av.J.C. l’intérêt se concentra totalement sur l’infanterie. La cavalerie devint donc un lointain souvenir de l’époque Mycénienne. Nous savons que sous Solon (640-558) il n’y eut qu’environ 100 cavaliers à Athènes. Ce qui rendit la cavalerie impopulaire ne fut pas seulement sa relation "aux riches", mais aussi son incommodité. Il faut penser que les cavaliers n’avaient ni de selle (Seulement une simple étoffe mise sur le dos du cheval), ni d’étriers. Savoir comment manier un cheval au combat nécessitait donc un long entraînement.
 


 

Hoplites s’affrontant, suivit par un joueur de flute

   Les éleveurs de chevaux les plus mentionnés dans les textes anciens furent les Thessaliens et les Scythes. Ils étaient notamment les grands maîtres cavaliers de l’époque. Ils savaient monter à cheval au galop et en même temps tirer à l’arc. À nouveau dans ce cas, les Grecs profitèrent énormément du talent des peuples voisins en les recrutant comme mercenaires dans les rangs de leurs armées.
 
   Les grands rivaux des Grecs, les Perses, utilisèrent la cavalerie comme pilier principal de leur armée. Rapide et fatale, elle eut souvent le rôle d’éliminer et d’ajouter une "pression complémentaire" sur l’arrière ou les côtés des lignes ennemies. En 494, Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425) nous raconte que durant la bataille de Malène (À Atarnée en Éolide), les Ioniens et Éoliens subirent une défaite écrasante lors d’une attaque de la cavalerie Perse sur les côtés de leurs phalanges. Les Grecs apprirent la leçon et essayèrent à partir de cette époque d’empêcher les déploiements des cavaliers adversaires en protégeant l’arrière et les flancs avec des moyens supplémentaires.
 
   Avec la Guerre du Péloponnèse (431-404), les règles et rituels classiques d’une bataille hoplitique (voir Chapitre En bataille) se rompirent. La partie commença à se jouer sur les "raids" et les destructions des villages des pro-Spartiates ou pro-Athéniens. Les Grecs donnèrent donc une nouvelle importance à leur cavalerie. En même temps que l’infanterie légère, la cavalerie prit un rôle primordial pour "déranger" l’adversaire. Comme Thucydide (Homme politique et historien Athénien, v.460-v.400/395) nous l’explique dans son livre La Guerre du Péloponnèse : la cavalerie eut comme rôle d’attaquer l’arrière des lignes ennemies et de protéger l’arrière de ses phalanges ainsi que ses côtés.
 
   À cette époque, le cavalier était équipé d’une longue lance qui pouvait être utilisée pour percer ou pour être lancée. Par contre, elle ne pouvait pas être utilisée comme une lance médiévale, donc être simplement tenue sous le bras et laisser faire son jeu à la vitesse et à la force d’impact. Il fallait utiliser les mouvements des bras pour infliger des coups à l’adversaire. De plus, les lances antiques, n’étaient pas aussi résistantes et longues que celles médiévales. Autre que la lance, le cavalier Grec utilisait aussi le kopís (voir chapitre L’Armement) comme épée. En général, il n’y avait pas de tenue obligatoire. Les cavaliers ressemblaient à des fantassins légers sur un cheval. Même si la popularité des batailles fut pendant des siècles attribué à l’hoplite, la cavalerie vit finalement ses moments de gloire sous le Roi de Macédoine Philippe II (359 – 336) et puis sous son fils Alexandre le Grand (336-323). L’effectivité ainsi que l’importance que donna le Roi ses cavaliers pour la rapidité, furent des éléments clés lors de la victoire sur les cités-États Grecques, ainsi que sur tout l’Empire Perse.


 

Combat entre hoplite et cavalier Perse

 

Le siège

 
   Thucydide dit que la construction de fortifications fut un symbole de progrès économique. Les Grecs par contre, comparés à d’autres civilisations du Moyen-Orient, étaient très en retard dans l’art des fortifications, ainsi que dans celui du siège. Lorsque les Perses attaquèrent la Grèce (En particulier ses colonies en Asie Mineure), ils amenèrent une technologie de siège totalement inconnue de la société Grecque. En fait, que dans des rares situations les armées des poleis conquirent les cités voisines. Dans la plupart des cas, les hoplites ravageaient la campagne autour d’une ville pour affaiblir l’adversaire. À moins qu’une armée adverse ne sorte de la ville pour opposer résistance, les hoplites continuaient leur travail de saccages.
 
   Les campagnes militaires longues étaient également exclues, étant donné que cela pouvait devenir très coûteux pour les villes attaquantes, ainsi que pour les paysans restants qui devaient fournir l’armée en provisions. La grande majorité des villes Grecques, respectivement Mycéniennes, furent construites sur des sites facilement défendables qui permettaient une vue lointaine ainsi qu’une protection naturelle. Les défaites des Ioniens durant les sièges Perses apprirent au monde Grec qu’il fallait perfectionner ses défenses, spécialement les murs. Ceux-ci devinrent ainsi plus hauts, plus larges, ainsi que plus robustes. Cependant, les murs autour des villes commençaient à s’édifier de façon trop éloignée, les faisant sortir des positions difficilement pénétrables par les engins de siège et les rendant ainsi des cibles parfaites. Les fossés devant les murs n’existèrent pas jusqu’à après la Guerre du Péloponnèse (431-404).
 
   Ce ne fut que durant ce conflit, que les Grecs ce donnèrent la peine d’utiliser des armes de siège, même si ce fut la plus part du temps sans succès. En effet, selon Thucydide durant le long siège de Platée, des Spartiates, ceux-ci utilisèrent des engins de siège primitifs qui ne servirent à rien. Les Athéniens qui étaient les "plus expérimentés" dans l’art du siège à l’époque, recoururent souvent à la simple méthode d’encerclement d’une ville, comme durant le siège de Potidée (430-429 av.J.C.) ou de Syracuse (415-413 av.J.C), plutôt qu’a de vrais engins de destruction. L’unique fois où une machine de siège fut utilisée avec succès durant une attaque, fut une lance flamme construite par les Boétiens et utilisée contre le camp fortifié Athénien de Délium. Il faut souligner toutefois, que la lance flamme dut son succès aux simples palissades en bois du camp.
 


 

Poterie représentant la Guerre
du Péloponnèse

   Parler donc de machines de siège, durant l’époque de gloire des hoplites est totalement inapproprié. L’unique moyen de prendre une ville était simplement de lui enlever ses approvisionnements en nourriture et eau, ou de chercher la victoire sur le champ de bataille. Le maniement des machines imposantes comme l’hélépole ou la baliste resteront un art maîtrisé avec succès que par les Macédoniens, ainsi que par les Romains qui, entre autres, s’inspirèrent énormément des inventions d’Archimède et d’autres savants Grecs de l’époque.
 

Les campagnes militaires

 
   L’histoire nous a montré qu’hormis la défense, l’attaque appartint aussi à la vie militaire de l’hoplite. Nous savons que les différentes villes se trouvaient parfois à des centaines de kilomètre de distance entre elles. Les cités, voulant entreprendre une campagne militaire, devaient donc prendre en considération des facteurs logistiques ainsi que financiers. Autour du VIII/VII siècle av.J.C, attaquer une ville lointaine ne rentrait pas en question. Les opérations militaires se réduisaient à un maximum d’une semaine de transport pour ne pas affaiblir l’économie de la cité. On se contentait donc de n’attaquer que des positions stratégiques adversaires profitables, comme par exemple des greniers ou des gisements minéraux. On parle alors de "campagnes militaires rentables".
 
   Durant la Guerre du Péloponnèse (431-404) les alliances s’élargirent, permettant aux armées de se bouger plus facilement tout en sachant qu’ils recevraient de l’aide de la part des villes alliées. À nouveau, dans ce cas, il y eut une différence entre le mode de mobilisation, mais aussi le bagage de l’hoplite Spartiate comparé à celui Athénien.
 
   Quand l’armée Spartiate partait en guerre, le Roi (Seulement un des deux souverains menait ses troupes en bataille) faisait le jour avant de partir, des sacrifices aux Dieux. Le feu utilisé pour le sacrifice, était porté par un dadophore (En Grec : δδοϕόρος dadophóros  "porteur de flamme") jusqu’à la frontière de la Laconie. Une fois Arrivé, le Roi avec son armée faisait un autre sacrifice. Si celui-ci lui était à son tour favorable, l’armée pouvait continuer, toujours accompagnée par la flamme qui ne devait jamais s’éteindre. Ceci nous montre à quel point l’armée Spartiate était liée à la religion et aux auspices.
 
   Tout soldat Spartiate (Vu qu’ils appartenaient à la haute classe sociale) avait le luxe de pouvoir être accompagné d’un ilote, une sorte de "paysan-esclave". Ce dernier portait en partie les ravitaillements de l’hoplite qui consistaient principalement en flocons d’avoine et orge, mais aussi en fromage, oignons et viande salée. Cette ration devait suffire pour maximum 20 jours et valait pour tout le monde y compris le Roi en personne. L’armée était aussi accompagnée par des animaux de somme, tirant des chars avec les ravitaillements et ustensiles nécessaires (Haches et pèles pour libérer le chemin de marche, ainsi que les objets pour les "médecins" et les charpentiers) dans le cas où la campagne dut se prolonger. L’hoplite Spartiate portait le nécessaire pour dormir, ainsi que quelques vêtements de rechange, attachés à son bouclier. Ce nécessaire ne comprenait pas d’abris pour la nuit. La construction de tentes ainsi que les cabanes étaient improvisés lors de la campagne.

 
Soldats Perses


   Normalement, l’armée Spartiate procédait en forme de carré : le côté postérieur et antérieur en formation de phalange, les ailes en colonne et au centre les bagages, l’infanterie légère et les non-combattants. Lorsque l’armée rencontrait des passages étroits, elle envoyait l’infanterie légère pour éclairer la voie, évitant ainsi les risques d’embuscades. Chez les autres poleis ainsi qu’à Athènes, ce rôle fut aussi pris par la cavalerie. La nuit, l’armée se plaçait sur des plaines ouvertes. Le camp était improvisé. Il n’y avait pas de murs, que des soldats qui montaient la garde. À nouveau, la partie non-combattante de l’armée se trouvait au centre du "camp". Des feux étaient allumés pour se réchauffer. Les Grecs en général, ne connaissaient pas les règles de la construction de fortifications, comme ce fut le cas pour les Romains. Chaque matin avant de partir, le Roi faisait un sacrifice en honneur des Dieux.
 
   En ce qui concerne Athènes, il n’y eut pas de grandes différences avec Sparte dans la façon de s’organiser pour une campagne. Ses méthodes dépendaient souvent du ou des stratèges qui guidaient l’armée. La nourriture de l’hoplite Athénien consistait en des oignons, du thym et du poisson salé enveloppé dans des feuilles de figues. Le tout était conservé dans un panier d’osier appelé gýlios (En Grec : γύλιος). L’hoplite Athénien possédait une brochette en métal pour cuire la viande fraîche, récupérée au cours de la campagne.
 
   Le soldat (S’il avait les moyens), était accompagné par un skēnophóros, un porteur de bagages, ou par un jeune membre de sa famille pour que celui-ci gagne en expérience militaire. Le skēnophóros marchait à côté de l’hoplite et portait une grande partie de ses bagages, comme par exemple son lit, qui était une sorte de sac à couchage appelé strmata (En Grec : στρώματα). En cas de danger, le porteur avait le temps de se retirer vers l’arrière ligne sans perdre la nourriture et le matériel nécessaire pour la campagne de l’hoplite. Pour les Athéniens également il n’y avait aucune organisation fixe pour la construction de camps ou pour le transport d’abris (C’était normalement les citoyens aisés et les officiers qui pouvaient se permettre de porter une tente avec eux). À Athènes, à partir de 462 av.J.C, la paye des différents soldats de l’armée fut fixée par la ville.

 

En bataille

 
   Durant toute l’histoire "Hellénique", la carte de la Grèce fut subdivisée en une multitude de couleurs marquant les villes rivales et alliés. Même sous l’époque des Guerres Médiques, les Grecs éprouvaient une forte rivalité l’un envers l’autre. Les batailles entre cités étaient coutumières. Les alliances changeaient tout le temps. La guerre qui nous est la plus nous connue et celle du Péloponnèse(431-404), qui nous a été transmise en détail par l’historien Thucydide (Homme politique et historien Athénien, v.460-v.400/395). Elle déchira la Grèce entre les États alliés à Athènes ou à Sparte et les États neutres.
 
   Sur les grandes plaines de la péninsule hellénique, il se développa au cours des siècles la formations la plus connue et la plus utilisée jusqu’à la fin du monde Grec et au-delà : la phalange. Une technique adaptée parfaitement à l’armure de l’hoplite, mais aussi au style de guerre Grec. En effet, on ne combattait plus pour soi-même, mais pour sa pólis. La compacité de la phalange montrait l’esprit d’union entre les soldats. Le slogan était : L’unité fait la force. Un exemple connu de l’Anabase nous montre que durant la bataille de Counaxa (Septembre 401 av.J.C.), les hoplites Grecs surent tenir leur formation tout au long de bataille et au savoir de la mort de Cirus, continuèrent à combattre et à former un corps unique et "auto-suffisant", sachant résister aux attaques Perses du Roi Artaxerxès II (404-359).
 


 

Buste d’un hoplite casqué
– Musée archéologique
de Sparte.

   De plus, dans une phalange, les nouvelles recrues pouvaient être intégrées sans compromettre énormément la formation. Ils étaient placés dans les lignes arrière (Une phalange était composée de 6 à 8 lignes en largeur et le nombre d’hommes par rang dépendait du lieu où on se trouvait. Pourtant, selon Xénophon (Philosophe, historien et maître de guerre Grec, v.430-v.355) les phalanges Spartiates comptaient 12 rangs en profondeur) et devaient seulement produire une contre-pression sur les lignes adversaires. Les vétérans se trouvaient dans les trois premières lignes et formaient la partie offensive de la phalange. Apprendre comment combattre dans une phalange ne demandait pas autant d’entraînement que pour le combat singulier. Or, comme nous l’avons vu sous le chapitre le citoyen-soldat, nombreuses furent les villes qui adaptèrent tout de même un système d’entraînement de 2 ans, pour apprendre les bases nécessaires aux jeunes recrues.
 
   Avec la phalange on créa une force d’impact qui fut à la fois offensive mais aussi défensive, grâce aux grands boucliers. Le premier rang tenait ses lances entre les espaces des boucliers, tandis que les soldats du deuxième rang posaient leurs lances sur les épaules de ceux du premier rang. Dans le cas où il n’y avait pas d’autres forces d’appuis, les côtés étaient protégés seulement par les boucliers d’une rangée d’hommes. L’arrière ligne d’une phalange restait dépourvue de toute protection et était donc son point vulnérable. Cela explique aussi pourquoi les Grecs essayaient toujours de protéger l’arrière en se plaçant dans des endroits étroits, comme durant la bataille de Marathon (Septembre 490), celles des Thermopyles (18/19/20 Août 480) ou celle de Platées (479). Si la protection de l’arrière n’était pas garantie par le terrain, l’infanterie légère ainsi que la cavalerie (Si elle était présente) s’en occupaient. La clef pour gagner une bataille, était soit de rompre la phalange adverse en exerçant assez de pression aux premières lignes, soit de faire des attaques rapides et puissantes à l’arrière.
 
   Pour expliquer plus en détail le déroulement d’une bataille, prenons un exemple quelconque d’une scène de combat entre deux phalanges de différentes cités :
Les guerres de l’Antiquité étaient (Du moins jusqu’à la moitié du Ve siècle av.J.C) organisées et suivaient un schéma précis, ce qui pourrait étonner un grand nombre de personnes. Premièrement, les batailles et les raids se faisaient durant les belles saisons, donc à partir du printemps. Deuxièmement, les batailles directes étaient rarement appliquées. En effet, comme déjà mentionner dans le Chapitre le siège, le but primordial pour gagner une guerre était d’affaiblir l’ennemi en nourriture et matériel agricole. Les hoplites ravageaient et brûlaient les champs et coupaient les oliviers et les vignes. Ceci devint un procédé mécanique qui avait lieu presque tous les ans. Une bataille commençait seulement si l’armée de la cité adversaire décidait de sortir pour affronter l’ennemi. Le terrain choisi était souvent une plaine ou une prairie, permettant des manœuvres parfaites pour la phalange. Comme toujours le premier arrivé prenait la meilleure place. Les batailles étaient faites durant les heures les plus claires, puisque l’obscurité rendait le combat impossible.
 
   Les phalanges adversaires se plaçaient face à face, subdivisées en quelques blocs ou en un seul composant rectangulaire de longueur variable selon la situation. Parfois, les peltastes ou les frondeurs se trouvaient repartis devant les phalanges pour tirer sur l’ennemi lorsqu’il se rapprochait, avant de s’enfuir derrière les lignes, juste avant l’impact. Les archers se trouvaient aux arrières lignes. De nombreuses prières et sacrifices étaient offerts aux Dieux pour garantir la victoire. Avant chaque bataille une vraie cérémonie rituelle se déroulait. Dans notre cas (Et comme dans presque tous les cas durant une bataille entre deux cités-États) le nombre de cavaliers fut trop petit pour avoir une importance directe.


 

Léonidas I aux Thermopyles –
Jacques-Louis David – 1814 – Musée du Louvre

 
   Avant la bataille, les soldats laissaient la plus grande partie de leur équipement à terre ou le laissaient sous la garde du skēnophóros, s’ils en possédaient un. Certains buvaient même du vin afin d’alléger leur peur sous l’emprise de l’alcool d’autres (S’ils avaient les moyens) s’huilaient pour rendre leur corps glissant, mais aussi comme rite de purification et de préparation à la mort. Il faut rappeler que l’armure hoplitique pouvait atteindre les 35 kg. Porter ce poids sous un soleil cuisant pouvait être plus fatal que la lance ennemie. Le stress était omniprésent même pour les vétérans. Le Stratège (Dans certains cas il y en eut même plusieurs) donnait les ultimes ordres aux Taxiarques et aux sous-commandants. Avant l’affrontement, les hoplites tapaient avec les lances sur leurs boucliers et criaient pour intimider l’ennemi. Quand l’ordre d’attaquer était donné, les aulètes donnaient le rythme de marche. Avant l’impact ce rythme était accélérer afin de stimuler le soldat.
 
   Il faut dire, tout de même, qu’il y avait des fois ou deux phalanges n’avançaient en même temps. Parfois un côté se bougeait, tandis que l’autre restait sur place. Pour ce dernier, rester immobile donnait la possibilité à ses peltastes, frondeurs et archers de tirer leurs projectiles sur les hoplites adverses. Dans ce cas, les "cibles" n’avaient pas un très grand choix à faire. Si le nombre de projectiles reçus était trop grand, les soldats s’arrêtaient et les premières lignes essayaient de se protéger au maximum en se faisant le plus petit possible derrière le bouclier, sans compromettre naturellement la formation. Normalement, les hoplites face aux projectiles baissaient le regard, puisque l’ouverture des yeux était le point faible des casques Corinthiens et espéraient que rien ne touche une partie ouverte de leurs jambes. Si jamais quelqu’un était touché et blesser, ses camarades essayaient d’avancer en évitant de le piétiner.
 
   À Marathon et aux Thermopyles la quantité de flèches lancées par les milliers d’archers Perses fut gigantesque. Les hoplites Grecs durent s’accroupir par terre derrière leur bouclier et couvrir toute place vitale ouverte aux projectiles ennemis. Mais retournons à notre bataille. Passé les lancés de projectiles, les deux phalanges (ou une selon l’exemple) continuaient à avancer. Avant l’impact, les hoplites des deux côtés criaient le péan (un chant en honneur du Dieu Apollon) ou l’Alalà (originairement Alalos, Alalà fut le fils de Polémos, démon de la guerre. Selon la légende Alalà accompagna le Dieu de la guerre Arès et avant d’attaquer il cria Alale alala) ou, s’il s’agissait des Spartiates, le chant de Castor.
 
   L’hoplite savait qu’il ne pouvait s’enfuir d’un combat sans que cela lui coûte le déshonneur sa famille et de lui-même. Donc pour lui il n’y avait qu’une direction, vers l’avant, vers la phalange ennemie. La force d’impact lorsque les deux phalanges entraient en contact était brutale. On ne pouvait pas reculer. Normalement, le contact entre les boucliers et les lances était décisif. C’était le moment où le soldat avait le plus de force et où l’élan de l’attaque était assez fort pour briser l’autre phalange dès le début. Après ce contact initial, il se créait entre les deux lignes un petit espace, pour permettre aux soldats des deux premières lignes de manier leur lances, voire leur épée si cette dernière était déjà brisée.
 

Statue moderne en
bronze de Léonidas I
dans le centre de Sparte

 

   Les sens jouaient un rôle primordial durant un combat. Il fallait retenir sa peur. Surtout ceux des dernières lignes, qui n’étaient pas occupés à combattre, pouvaient être littéralement pris par la panique. Les sens de l’hoplite étaient quasiment désactivés. Les casques donnaient en plus une vue minimale et les ordres donnés par les commandants n’étaient presque pas entendus compte tenu du bruit. L’impact des boucliers ainsi que le grincement du métal des armes étaient assourdissant.
 
   Les premiers cris des mourants et des blessés, ajoutés à l’odeur de la sueur et du sang étaient amplifiés dans cet entrechoquement de bronze et de fer. L’équilibre était également important, vu que le sol devenait rapidement glissant par le sang versé. Mourir de saignement était très fréquent, ainsi qu’être piétiné. En effet, lorsqu’on tombait, la “chance” de mourir sous les pieds de l’ennemi ou sous celles de ses camarades était très grande. À chaque fois qu’un soldat tombait et qu’un "trou" se créait dans la rangée, le soldat de la deuxième ligne avançait et devait faire face à d’autres inquiétudes, que de se concentrer à ne pas piétiner son compagnon à terre.
 
   Le combat entre hoplites était plutôt une lutte qu’un combat élégant. Normalement, on essayait d’arracher la lance à l’adversaire pour le faire tomber ou d’emporter l’adversaire avec soi au sol et le couvrir de coups de poings, de lui crever les yeux ou de le tuer avec de coups d’épées. Il n’y avait pas de règle durant un combat tout était permis. De nombreux combats "détachés" (Voire chapitre : Le combat singulier) commençaient ainsi sur les côtés des phalanges, voire même devant celle-ci. En effet, même si le combat individuel des temps homériques était "interdit", il pouvait se passer que lorsque les deux phalanges prenaient des distances pour se reposer, il y avait encore des petits groupes d’hoplites qui restaient bloqués au centre et étaient ainsi obligés de continuer leur combat pour survivre.
 
   À un certain moment, une des deux lignes cédait (Soit sous la pression de la phalange adversaire, soit pour d’autres raisons). Ceci créait une réaction en chaîne massive. Les perdants voyant que la phalange, leur unique moyen de survivre et de s’opposer à l’ennemi de façon unie, se disloquait, prenaient la fuite. Ils jetaient leur bouclier et armes lourdes et couraient, sans essayer d’opposer une résistance. Le moment le plus fatal, où il y avait le plus de morts, était ce moment de la dissolution d’une phalange. La pression de la phalange adversaire relâchée était tellement puissante, qu’elle écrasait un grand nombre d’hoplites ennemis, tués sous les pieds ou les lances adverses. Lorsque l’ennemi s’enfuyait, c’était le rôle de l’infanterie légère ou de la cavalerie de le poursuivre. Les hoplites étaient épuisés et n’avaient plus la force de courir avec cette carapace en bronze sur le corps. Normalement les phalanges s’arrêtaient et se reformaient. Ce n’était que lorsque l’ennemi avait fui assez loin et que les derniers petits combats étaient terminés, que les formations se dissolvaient.
 
   Les hoplites tuaient les mourants et ceux qui ne pouvaient plus être sauvés. Les morts étaient dépouillés de leurs armures. Normalement, s’il s’agissait d’une armée envahissante, ayant programmée une campagne à long terme, elle portait des approvisionnements avec elle (Voir chapitre : Les campagnes militaires). Or, un certain nombre de ces ravitaillements était amené du campement au champ de bataille, pour fournir immédiatement les hoplites après le combat. Durant les retraites, ces approvisionnements étaient souvent abandonnés sur place, à la joie de l’armée victorieuse.
 
   Les deux cités s’accordaient ensuite un temps pour récupérer leurs morts et les honorés de façon digne, comme des héros. Ceci montre à nouveau l’importance prise par le côté "rituel" lors d’une guerre. Malheureusement, ce respect disparut durant la Guerre du Péloponnèse (431-404) et tous moyens pour "blesser" la cité rivale étaient bons. Du côté des vainqueurs, des offrandes, souvent collectées sur le champ de bataille, étaient offertes pour sacraliser les Dieux d’avoir donné la victoire. Le Stratège faisait des discours pour honorer le courage des soldats décédés au combat et pour remonter le moral des survivants. Par contre, la victoire n’était pas toujours fêtée directement. En effet, la plus grande partie de la soirée était dédiée aux enterrements, ou aux sacrifices. Peu restait à festoyer, comme Hollywood se plait à le montrer. La plupart allait dormir, épuisé par les blessures et la fatigue des combats durant la journée.
 


 

Hoplites et archers Scythes –
510-500 av.J.C –
Musée Claudio Faina Orvieto

   Les vaincus de leur côté, n’avaient d’autre choix que de se retirer dans leur ville ou dans leur campement, de panser leurs blessures ainsi que de pleurer leurs morts et la défaite. Les lendemains de la bataille étaient généralement dédiés aux traités entre les deux cités. Chaque côté essayant de tirer le meilleur de la situation.
 

Le combat singulier

 
   Que ce passait-il, si une phalange se rompait vraiment ?. Dans la plupart des cas, un hoplite prenait la fuite puisqu’une phalange rompue signifiait la défaite. Pourtant, parfois l’hoplite était obligé d’engager le corps à corps s’il voulait survivre. Sur le champ de bataille l’orientation n’était pas chose simple et le soldat se perdait rapidement dans le chaos de la bataille. Lors de la retraite, un hoplite laissait tomber ses armes, surtout le bouclier et le casque. En effet, le premier était seulement un poids supplémentaire le rendant plus lent et le deuxième empêchait une bonne vue et annulait ses sens. Le casque restait seulement utile dans les combats en groupes où la vue se concentrait seulement sur l’ennemi en face.
 
   Ce qui pouvait aussi se passer durant une bataille, était que les hoplites en retraites, allaient chercher de la protection près des phalanges encore intactes. Cela donnait lieu à des petits combats singuliers sur les côtés des phalanges présentes encore sur le champ de bataille. L’épée était alors tout de suite utilisée puisque le but du combat singulier était de faire perde le plus rapidement possible l’avance de l’ennemie et de le tuer en perçant le xíphos à ses points vitaux. À l’époque, on note déjà l’apparition d’une forme de combat qui sera connue plus tard comme le pancrace (En Grec : παγκράτιον pankrátion). Cette forme de combat était proche des principes de la lutte moderne. Le pancrace apprenait à l’hoplite comment jeter l’adversaire à terre, le tenir bloquer et si possible l’étrangler. Au contraire de la lutte olympique, le but primaire du pancrace était de tuer.
 
   Les maîtres du pancrace étaient les Spartiates. Leur entraînement durant l’enfance et la jeunesse, leur apprenait comment agir en combat singulier, puisque lors d’une bataille, un soldat qui ne savait pas se débrouiller seul était un soldat mort. Si deux hoplites devaient s’affronter sur le terrain, le but premier était de ne pas laisser la peur les envahir. Elle bloquait l’esprit, rendait le soldat irrationnel et une proie facile pour la lance ou épée de l’adversaire.
 
   Pour arriver au combat singulier, une phalange ne devait pas toujours se rompre. En effet, il y avait souvent des combats singuliers entre les différentes unités de peltastes qui essayaient d’encercler l’ennemi par les côtés. Étant armés plus légèrement, ils avaient plus de facilité à se bouger et à s’échapper. Face à ces soldats rapides, un hoplite lourdement armé n’avait aucune chance.
 
   Il convient aussi parler de la cavalerie. Or, vu normalement le nombre limité de cavaliers utilisés en bataille, ils rentreraient mieux dans ce chapitre, plutôt que dans celui de la bataille. Le combat entre cavaliers n’étaient pas un combat de masse, mais basé sur le combat singulier. Le but était de percer l’ennemi avec sa lance, de lui infliger des coupures sur les jambes ou de le tirer et lui faire ainsi perdre son équilibre (Rappelons que les cavaliers de l’époque n’avaient pas de selle, ni de positions stable sur le cheval). Le moment le plus fatal pour l’infanterie, était lors de l’impact d’un assaut des cavaliers sur elle. Cependant, dès que l’impact de la charge de cavalerie se bloquait dans les rangs de la phalange, le cavalier étant légèrement armé, devenait une proie facile pour le dóry hoplitique. Durant une retraite, l’hoplite avait aussi dans ce cas, des grandes difficultés à échapper à un groupe de cavaliers, le poursuivant à pleine vitesse.


 

Buste de Léonidas I

 
Et Sparte ?

 
   Compte tenu de l’importance de cette cité dans l’art de la guerre il est important de lui dédier un chapitre personnel. Ce que les gens pensent de Sparte aujourd’hui, est toujours lier à la bataille des Thermopyles (18/19/20 Août 480) et aux "actes héroïques des 300 durant cette bataille". Certes, toute légende à son grain de vérité. En terme de culture et d’évolution, il est difficile de comparé Sparte à la haute culture Athénienne. La plupart des informations sur la ville de Sparte, nous viennent d’historiens "externes" comme Hérodote (Historien Grec, 484-v.425) et principalement Xénophon (Philosophe, historien et maître de guerre Grec, v.430-v.355). Ce dernier fit une description détaillée, dans son livre les "Helléniques", de l’histoire de Sparte. Ou encore des quelques fouilles archéologiques faites sur l’ancien site de la ville.
 
   Sparte et Athènes étaient comme le blanc et le noir, totalement différentes en pensées et actes. Pour comprendre l’évolution de cette classe militaire, mais aussi sa vie et entraînement, il faut tout d’abord se créer un aperçu des origines de Sparte. La ville a toujours eut des croyances superstitieuses qui servaient surtout à souligner ses "grandes" origines, ainsi que de motivé l’esprit militaire de ses hoplites. Selon la légende, les Spartiates se voyaient comme des descendants d’Hercules. Pourtant, en premier plan ils restaient des Doriens, qui entreprirent une conquête de la Laconie sous "le guide des descendants du grand demi-Dieu". Au Xe siècle av.J.C, la ville était composée des quatre villages suivants : Limnai, Kynosoura, Mesoa et Pitana, un cinquième, Amyclées, distant de quelques kilomètres, viendra s’y ajouter à une époque toujours inconnue. Ceci fut la raison pour laquelle la cité eut toujours deux Rois, de deux dynasties différentes.
 
   Avec le temps, ces Doriens, furent appelés Laconiens. C’était un terme géographique qui caractérisait tous les habitants autour de la ville. Plus ancien encore et qui définit l’élite de la ville elle-même, fut le terme "Lacédémoniens". Mentionné pour la première fois chez Homère, les Lacédémoniens sont les combattants de la ville de Sparte, donc le noyau dur de celle-ci, qui deviendra avec le temps une minorité. Plus tard, la cité se divisa en trois grandes classes : Les homoioi (ou Hómoioi, en Grec : Oμοιοι  “les Semblables” ou “les Pairs" la traduction classique reprise lors de la Révolution Française, est en fait inexacte), les Lacédémoniens descendants des fondateurs de Sparte ; Les périèques (ou Períoikoi, en Grec : Περίοικοι) vivant autour de la cité, ils étaient libres mais n’avaient pas de droit politique et enfin les Hilotes (ou Ilotes ou Heílôtes, en Grec : Εïλωτες) qui étaient les serfs, les esclaves appartenant à l’État et formant la majorité de la population.
 
   Autour du VIIIe siècle av.J.C. se forma la Sparte militaire, qui nous est mieux connue. Le grand changement eut lieu durant les Guerres de Messénie (Il y en eut trois), époque d’expansion de Sparte à travers le Sud du Péloponnèse. Ces guerres marquèrent profondément la cité. Ce fut aussi la première fois dans l’histoire où l’on vit l’apparition des hoplites en formation de phalange sur un champ de bataille. Le succès remporté grâce à la discipline et l’organisation marqua l’esprit Spartiate. Or que peut-on attendre d’autre, d’une population qui a écrit son histoire avec des invasions et des guerres et qui se prend pour la descendante d’un demi-Dieu guerrier ?.
 
   Le changement définitif, se présenta lors d’une révolte d’Hilotes, connue sous le nom de Troisième Guerre de Messénie (464-454). Se sentant écrasés par les Homoïoï, ils décidèrent d’exprimer avec violence leur opinion envers l’État. Pour ne plus risquer une telle chose, l’élite Lacédémonienne se dédia totalement à un entraînement militaire rude. La puissance militaire s’accrut énormément. Le succès des campagnes, les territoires gagnés et la peur face aux "révoltes des Hilotes" convint le gouvernement de se perfectionner dans l’art de la guerre. Depuis la nuit des temps, Sparte fut une monarchie oligarchique, en termes plus exactes une double royauté oligarchique. Comme mentionné au début du chapitre, la ville fut une union des quatre villages. Ceci porta donc à deux dynasties royales, les Agiades et les Eurypontides, de gouverner en même temps sur la ville (Un cas unique dans toute la Grèce).


 

Soldat Athénien avec
l’équipement militaire complet
– Musée archéologique national
– Athènes

 
   Ces deux Rois étaient des "réincarnations vivantes d’Héraclès" et étaient égaux en termes de pouvoir et de statuts. Certes, des rivalités apparurent au cours de l’histoire de la ville. Pour éviter une escalade des disputes, les anciens inventèrent une légende, selon laquelle les deux premiers jumeaux des deux dynasties naquirent en même temps. On ne pouvait donc pas identifier qui était plus âgé et on évita ainsi une supériorité d’une des deux dynasties. De plus, un Roi pouvait observer et contrôler l’autre, ceci évitait qu’un obtienne trop de pouvoir et crée de suite une tyrannie, chose que les Spartiates haïssaient.
 
   À côté des Rois, il y avait le conseil des Gérontes : la Gérousie (ou Gérousia ou Gerousía, de gérôn, en Grec : γέρων “le vieillard"). Ce conseil était composé d’anciens Lacédémoniens. Pour pouvoir entrer, il fallait avoir 60 ans, être financièrement aisé ainsi qu’avoir des racines aristocratiques. Les membres restaient à leur poste jusqu’à la mort et ne devaient rien rendre au peuple, ils étaient comme les Rois intouchables. Il y avait en tout 28 membres (Avec les deux Rois ils étaient donc trente). La Gérousie faisait office de Cours suprême de justice. Il y avait encore un troisième pouvoir, les Éphores (ou éphoroi, en Grec : Eφοροι), dont le nom veut dire “les surveillants“, étaient un directoire de cinq magistrats élus annuellement, dont le but était de garantir l’ordre public ainsi que de contrôler le pouvoir royal et d’intervenir comme arbitres en cas de désaccords entre les deux souverains. Les membres ne pouvaient pas être réélus pour une deuxième année.
 
   Même si ceci semble être une forme de démocratie dans un régime militaire monarchique, Aristote (Philosophe Grec, 384-322) et Xénophon affirment que le pouvoir des Éphores fut immense. Les rivalités entre les membres de la Gérousie et les Éphores étaient grandes. Durant des réunions les Rois avaient du mal à calmer les disputes entre les magistrats. Hormis ces autres pouvoirs, les Rois détenaient toujours l’ultime mot ainsi que le respect des soldats. Selon Hérodote, dès la naissance la vie d’un Lacédémonien était rude. Les mères étaient obligées de donner leurs nouveau-nés à un ancien qui examinait l’enfant.
 
   Si celui-ci était trop faible, malade ou malformé on l’abandonnait ou on le jetait dans une crevasse. Que les enfants "parfaits" pouvaient être dignes de survivre et ainsi servir l’État à vie. À Sparte et Athènes, on ne devenait citoyen qu’à travers les liens de sang. Donc, seulement si les parents étaient citoyens, l’enfant pouvait le devenir. À l’âge de sept ans, l’enfant était enlevé à sa mère et devenait une propriété de l’État. Aujourd’hui, nous ne savons pas exactement s’il y avait un vrai lien familial dans les familles Spartiates. Le père était rarement à la maison et en ce qui concerne la mère, aucun texte ne mentionne ses sentiments envers son fils. Les enfants males étaient emmenés dans des camps spéciaux où ils étaient soumis à un entraînement physique et une éducation très rude, l’agôgê (ou agōgē, en Grec : γωγή).
 
   Ils dormaient sur des simples nattes, combattaient contre leur professeur ou leurs camarades, étaient attachés à des arbres et fouetté jusqu’à l’évanouissement et apprenaient le maniement des armes. Avec l’âge, cet entraînement devenait de plus en plus brutal. Durant l’hiver, un simple manteau rouge était porté au-dessus de la tunique. Souvent, les jeunes devaient voler leur nourriture, sans naturellement se faire prendre. Selon Plutarque (Philosophe, biographe et moraliste Grec, 46-v.125), un jeune Spartiate vola un jour un renardeau et pour ne pas se faire prendre le cacha sous son manteau. Celui-ci lui dévora le ventre et le garçon préféra résister jusqu’à la mort plutôt que d’être découvert. Telle était la résistance à la douleur du Spartiate. La mort durant l’entraînement n’était pas un cas rare.
 


 

Reconstitution d’un
hoplite Athénien

   À 16 ans, l’existence du Spartiate devenait encore plus rigoureuse et stricte. À 18 ans, le jeune soldat devait réussir une ultime épreuve, tuer un Hilote sans être vu ou aperçu. L’épreuve réussit, l’entraînement était complet et il pouvait finalement être intégré dans l’armée ainsi que participer aux campagnes militaires. Recevoir son propre bouclier et armure ce qui était un grand honneur pour lui et sa la famille. Cela signifiait que l’enfant avait survécu le rude entraînement durant toutes ces années. À l’âge adulte, le soldat pouvait participer à la Cryptie (En Grec : κρυπτεία krupteía ou κρυπτή kruptế, formé sur le verbe κρύπτω kruptô “cacher, se cacher, dissimuler“), un rituel où des soldats choisis étaient relâchés dans la nature sans rien et devaient survivre par leur propres moyens. Durant ce rituel, les Éphores votaient une loi qui permettait aux participants de tuer des Hilotes, s’il le fallait pour survivre. Réussir cette épreuve montrait la valeur et le courage de l’hoplite. Il faut préciser tout de même, que le déroulement de ce rituel ainsi que les idées sur son importance changent selon les différents auteurs anciens.
 
   À partir de l’âge de 20 ans, le Spartiate pouvait finalement mener une vie familiale et siéger à la Syssitie (En Grec : τ συσσίτια ta sussitia), le repas collectif des hommes. Un hoplite Spartiate détenait un grand nombre de droits. Il était l’élite de la société. Étant propriété de l’État, c’était aussi celui-ci qui s’occupait de "l’entretien" du soldat et de sa famille. Il recevait sa maison et était approvisionné en nourriture et matériel quotidien. Rappelons que l’État Spartiate détenait un grand nombre de terres ainsi que d’esclaves pour les cultivés "gratuitement". Les femmes dans la société Spartiate n’avaient pas grand-chose à dire. Elles étaient utiles pour donner un futur male à la cité et à la lignée du mari. Par contre, selon les textes anciens, elles étaient renommées, elles aussi, pour avoir une grande force physique. Notamment si un jeune homme voulait prendre une femme comme épouse, il devait parfois la combattre pour la gagnée et si celle-ci le battait, l’homme échouait.
 
   L’idéal de beauté de l’époque pour les hommes était de porter les cheveux et la barbe longue. Cette chevelure était non seulement attractive à l’époque, mais aussi terrifiante pour l’ennemi si elle était combinée avec les classiques couleurs rouges des Lacédémoniens. En ce qui concerne la guerre, nous savons maintenant que Sparte fut l’inventeur de la phalange ainsi que d’une grande partie de l’équipement de l’hoplite. Le soldat Spartiate ne fut tout de même pas toujours un soldat complètement protégé par une armure. En fait, au début ils ne portaient aucune protection pour le corps. Les uniques armes qui lui servaient dans son style de guerre étaient : Le dóry, l’aspis avec le Λ caractérisant l’armée Lacédémonienne, le xíphos ainsi que la crête rouge transversale pour rendre l’hoplite encore plus imposant. Le casque en forme de bol disparut très rapidement et une armure fut ajouter au cours des siècles. Le rouge des tuniques et de l’équipement Spartiate était lié avec l’agressivité en bataille, mais servait aussi à masquer les pertes de sang.
 
   Toute la société d’élite se fixait sur la guerre. Aussi en terme hiérarchique, la ville était beaucoup plus organisée au niveau militaire qu’Athènes. L’unité de base était l’énomotie (ou enomōtía ou enomotìa “Corps de soldats”), composée originalement de 24 hoplites, disposés en trois rangées de huit éléments et commandée par deux officiers : l’Enomōtarchos en première ligne et l’Ouragós en arrière-ligne pour contrôler la cohésion de la formation. Deux énomoties (ou enōmotiai [section]) formaient une pentēkostē (au pluriel pentécostyes ou pentēkostys [compagnie]), commandée par un Pentēkontárchos (ou Pentēkontēr). L’unité principale de la phalange était finalement le lochoi (ou lóchos ou loches ou lochos [bataillons]), composé de 100 hoplites et commandée par un Lochagós (ou Lochagos).


 

Hoplite agenouillé – Médaillon d’un
kylix attique, v. 560 av.J.C – Staatliche
Antikensammlungen – Munich

 
   Selon Thucydide, qui décrivit de manière détaillée la composition de l’armée, à la bataille de Mantinée en 418 av.J.C, il y avait à celle-ci :

"Il y avait au combat …. 7 lochoi (ou loches ou lochos) subdivisés en 4 pentēkostys (ou pentécostyes) composées chacune de 4 groupes, les enōmotiai (ou ou enomōtía ou enomotìa) de 32 hommes, soit un total de 3.584 hommes. Pour chaque groupe, quatre hommes combattaient au premier rang. En ce qui concerne la profondeur, ils n’étaient pas tous rangés de la même manière, cela dépendait de chaque chef de bataillon, mais, en règle générale, ils se mirent sur huit rangs”.

 
   Il existait aussi une unité d’élite de la phalange Spartiate : Les hippeís qui malgré leur nom, n’étaient pas des cavaliers. Les hippeís formaient un corps de 300 hoplites qui se trouvaient sur l’aile droite de la phalange et avaient aussi le rôle de garde royale. Chaque année les trois Hippagrétai, élus par les membres des Éphores, devaient choisir chacun 100 hommes entre les meilleurs hoplites de la ville. Probablement ce fut aussi une grande partie des hoplites de la garde royale qui suivirent le Roi Léonidas I (490 à 480) à la Bataille des Thermopyles.
 
   Le nombre total de soldats de l’armée Spartiate tournait autour de 4.000 à 6.000 hoplites durant l’époque de Xénophon (Philosophe, historien et maître de guerre Grec, v.430-v.355), sans compté le reste des quelques unités exceptionnelles de mercenaires. Le soldat Spartiate fut vu longtemps comme quelque chose d’invincible, de tout puissant, un soldat qui ne craignait pas la mort et contrôlait la peur comme aucun autre. Tout le monde admirait leur style de combat, mais ressentait aussi de la peur vis à vis de ces guerriers redoutables. Sparte pouvait se vanter de nombreuses victoires, entre autre des victoires "héroïques" durant les Guerres Médiques (499-479). Avec la victoire de la Guerre du Péloponnèse (431-404), la ville atteignit son apogée mais elle fut également sa chute.
 
   Affaiblie par cette longue guerre, elle dut faire face à de nouvelles menaces de cités critiquant son style de domination rude. Une coalition entre Thèbes, Corinthe et Athènes causa une nouvelle guerre. Thèbes, étant la plus puissante entre les villes, guida la coalition. Elle dut au début faire face à des défaites contre les Spartiates mais gagna finalement sa suprématie après la bataille de Leuctres (6 Juillet 371 av.J.C.), où l’armée Thébaine, guidée par le Général Épaminondas (418-362), battit l’armée Spartiate en utilisant parfaitement sa cavalerie et en éliminant la garde royale de l’armée Lacédémonienne. Battue, Sparte fut placée sous la domination de Thèbes, mais ne se rendit pas si facilement. Elle arriva à mobiliser rapidement une autre armée et à tenir tête à Thèbes pendant longtemps. Ce ne fut que durant la bataille de Mantinée (362 av.J.C.) que Sparte reçut le coup fatal. À nouveau battue par Épaminondas avec la même tactique (Celui-ci mourra à cause d’un coup de lance dans la poitrine), Sparte dut finalement acceptée la prédominance Thébaine. Cependant, cette victoire ne servit à rien, les deux villes fortement affaiblies, subirent l’ascension de l’Empire Macédonien.


 

Cuirasse (thốrax) – Musée de Corfou

 
   Sparte acquit de nouveau un statu de vainqueur après la bataille de Chéronée (338 av.J.C.). Nombreuses furent les villes soumises au pouvoir de Philippe II (359-336) de Macédoine (Entre autre Athènes, la grande rivale de Sparte). Les Lacédémoniens bien qu’affaiblis, ne perdirent toutefois par leur caractère guerrier à la fois arrogant et agressif. En effet, une légende raconte que lorsque Philippe II les menaça : "Si j’entre en Laconie, je détruirai Sparte" ceux-ci répondirent avec un seul mot "Si". Cette ténacité et courage redonna à Sparte ses anciens moments de gloire. Ni Philippe II, ni Alexandre le Grand (336-323) n’essayèrent de la conquérir. Ils lui laissèrent même une sorte d’autonomie. Cependant l’hégémonie d’antan n’était plus qu’un souvenir lointain et la cité dut accepter d’être rattachée à l’Empire Macédonien durant l’époque Hellénistique.
 
   Face à un peuple de guerriers comme les Macédoniens, seule Sparte avec sa ténacité militaire légendaire put leur tenir tête. Athènes et nombreuses autres poleis perdirent leur combat pour la liberté. Longtemps mise à l’écart face à la haute culture Athénienne (Surtout durant la Renaissance), Sparte acquit de nouveau dans les derniers siècles un statu de légende et même jusqu’à nos jours, les Spartiates sont reconnus comme les premiers soldats professionnels de la Grèce. Toutefois, leur obsession militaire les empêcha de se concentrer sur comment laisser quelque chose au monde futur. On peut donc dire que "Sparte gagna la bataille contre la Macédoine, mais perdit la guerre contre l’Histoire".

 

Pour plus de détails voir : Sparte, les institutions,
Sparte, l’histoire des Agiades , Sparte, l’histoire des Eurypontides

 
Le déclin

 
   La "révolution hoplitique" eut un impact massif sur le style de guerre, mais aussi dans le développement de nombreuses cultures et cités du monde Méditerranéen et au-delà. Rappelons que les Étrusques ainsi que Rome elle-même, utilisèrent (Du moins dans les premiers siècles de leur histoire) ce style de guerre. Ce qui dut être au début un style de combat permettant à un grand nombre d’hommes de pouvoir se battre efficacement sans grande expérience en un groupe compact, devint très rapidement un art complexe qui requit de l’organisation. Même les Perses, grands rivaux de la Grèce, utilisèrent des mercenaires Grecs dans leurs rangs comme infanterie lourde. Cependant, rien ne dure éternellement. Souvent, quand quelque chose disparaît, c’est surtout parce qu’il est devenu démodé et dépassé.
 


 

Hoplites. Lécythe Attique à
figures noires – v.500 av.J.C
– Petit Palais – Paris

   Ce fut exactement le cas de la phalange Grecque face aux Macédoniens. Philippe II (359-336) copia la phalange et la rendit encore plus efficace en lui donnant un côté offensif beaucoup plus important. Les Grecs utilisaient des grands boucliers et de courtes lances, les Macédoniens de longues lances et des petits boucliers. Avec sa cavalerie d’élite, l’armée Macédonienne réussit à ajouter la rapidité à la force d’impact des phalanges. L’hoplite dut se résigner face à la conquête de Philippe II et de son fils Alexandre le Grand (336-323).
 
   L’hoplite a dominé pendant 400 ans les champs de bataille du sol Grec, sans se soumettre à d’autres changements ou améliorations. Rome à son tour, battit la phalange Macédonienne. La perfection guerrière des Romains qui combinait la protection ainsi que la rapidité d’attaque, fut fatale. Les longues lances Macédoniennes devinrent facile à entre-passées et les formations fermées des phalanges Grecques faciles à détourner. Mais Rome n’a-t-elle pas aussi commencé avec une phalange Grecque ?. N’a-t-elle pas mélangé le style de guerre Grec avec celui Samnite pour former le sien ?. L’hoplite disparut dans le temps, mais pas son style de combattre. Toujours effectué ou repris au cours de siècles, la phalange devint la formation défensive et offensive la plus utilisés dans le combat à l’arme blanche. L’hoplite finit "sous terre", mais ses exploits inscrit avec l’encre et immortalisés dans les contes et légendes. Homère, Xénophon, Plutarque et Hérodote louèrent le courage de ces soldats, différents selon les régions, mais identiques dans l’esprit.
 
   On dit souvent que l’union fait la force, ce fut peut-être cela la grande faiblesse des poleis Grecques et de leurs armées, ne jamais avoir été définitivement unis.

 

Bibliographie

 
   Pour d’autres détails sur les hoplites voir les ouvrages de :
 
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– Magazine Focus Storia Wars N°8 : Gli Assedi Più Feroci (édition Italienne), Avril 2013
– Magazine Focus Storia Wars N°14 : Raid & Incursioni (édition Italienne), Septembre 2014

 

Filmographie

 
   – Hoplite warfare, Réalisation : Ruth Wood, Mike Leighton, Bob Sessions, Brian Blessed, Cromwell Productions, DVD vidéo, Éditeur : Allegro Corporation, Allegro Corp., Portland, 2009.
Last stand of the 300, Réalisation : David W.Padrusch, Matt Koed, Sara Padrusch, Brian James, Vidéo DVD : École secondaire, Éditeur : Limulus Productions, History Channel (Television network), Arts and Entertainment Network,New Video Group., Distribution : New Video, A & E Television Networks, New York, 2007.

 

 

 
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